La pénurie de médecins du travail peut-elle exonérer l’employeur de sa responsabilité malgré l’obligation de sécurité de résultat qui lui incombe ? Le point sur la jurisprudence existante et les pistes à explorer.
Les entreprises et les praticiens du droit l’observent depuis quelque temps déjà : les difficultés à obtenir, en temps et en heure, des rendezvous auprès de la médecine du travail vont croissantes. Au point que le nombre d’employeurs susceptibles de se trouver, à leur corps défendant, en infraction suit cette même courbe dange reusement ascendante… dans un domaine où le manquement est, plus qu’ailleurs et légitimement, sévèrement puni.
On rappellera seulement pour mémoire que l’article L. 4121-1 du Code du travail impose à l’employeur de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». La jurisprudence en a excipé une « obligation de sécurité de résultat » 1 et a précisé, par de nombreux arrêts dont le dernier en date du 18 décembre 2013, qu’il appartenait à l’employeur d’en « assurer l’effectivité ».
LE SUIVI MÉDICAL DES SALARIÉS
Parmi la longue série d’obligations particulières qui viennent étayer cette obligation générale, le suivi médical des salariés se présente comme la plus évidente. Les articles R. 4624-10 et suivants du Code du travail, sous l’intitulé « Suivi individuel de l’état de santé du salarié », listent ainsi les divers examens médicaux, de l’embauche à l’inaptitude en passant par la surveillance renforcée ou par la reprise du travail, auquel tout employeur doit soumettre ses salariés.
Le manquement à cette obligation, générale ou particulière en ce que la seconde est une composante de la première, est sanctionné par un panel dont l’ampleur est à la mesure de l’enjeu.
Des sanctions pénales
Le droit pénal, tout d’abord, réprime la méconnaissance par l’employeur des dispositions relatives aux missions et à l’organisation des services de santé au travail 2, dont celle, exclusive, « […] d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail ».
À ce titre, lesdits services doivent notamment : « […] conduire les actions de santé au travail, […] conseiller les employeurs, les travailleurs et leurs représentants […] afin d’éviter ou de diminuer les risques professionnels […] et de contribuer au maintien dans l’emploi des travailleurs ; assurer la surveillance de l’état de santé des travailleurs en fonction des risques concernant leur sécurité et leur santé au travail […]. »
D’autres conséquences pénales pourront cependant être tirées d’un défaut de l’employeur en matière de suivi médical de ses salariés, si celui-ci équivaut à « un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement », lequel suffira à caractériser une infraction de blessures ou d’homicides involontaires 3
La faute inexcusable de l’employeur
Parallèlement, l’activation du pan civil de la responsabilité de l’employeur ne sera ni la moins probable ni la moins onéreuse.
Elle interviendra, en premier lieu, par le même mécanisme que sur le terrain pénal, dès qu’un lien, même ténu, sera établi entre l’absence de suivi médical et la survenance du dommage. En cas d’accident, ledit manquement caractérisera la faute inexcusable de l’employeur 4. En cas de licenciement pour inaptitude, prononcé sans considération des « propositions de mesures individuelles » du médecin du travail, celui-ci sera dépourvu de cause réelle et sérieuse 5. La prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié, à raison du défaut d’organisation des diverses visites médicales requises, connaîtra la même issue 6.
Enfin, même en l’absence de tout événement particulier, le seul constat du manquement, à la demande du salarié, lui garantira la reconnaissance d’un préjudice de principe et donc l’octroi de dommages-intérêts : « L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat, doit en assurer l’effectivité. Son manquement à l’obligation de faire passer une visite médicale d’embauche au salarié cause nécessairement un préjudice à l’intéressé […]. » 7
Auteur : Danièle Chanal et Philippe de la Brosse, Avocats associés SCP Joseph Aguera & Associés
Rappelons qu'à BPCE Sa, depuis le départ du médecin du travail en Décembre 2013 la direction nous affirme ne pas trouver de solutions pérennes pour trouver un nouveau médecin titulaire.
extrait de notre article du 17/3/2014:
Nous pensons que l'absence prolongée d'un médecin titulaire, dans ce contexte ne peut pas être un hasard et nous exigeons à nouveau la titularisation d'un médecin à BPCE Sa, pour répondre aux nombreux besoins des salariés.
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