Cass. soc., 15 janv. 2014, pourvoi no 12-20.688, arrêt no 99 FS-P + B
Une chargée de clientèle saisit la juridiction prud’homale
d’une demande d’annulation de son licenciement, estimant que ses absences
répétées étaient la conséquence d’un harcèlement moral dont elle était
l’objet.
Elle verse aux débats des comptes-rendus de réunions de délégués du personnel
faisant état du ressenti des responsables opérationnels qui se sentent
constamment épiés et surveillés et d’un management démotivant et décourageant
pour l’ensemble des salariés ; elle y ajoute un article de presse faisant état
d’un débrayage d’une cinquantaine de salariés en raison de « conditions de
travail déplorables, de stress et de pression insupportable ». Pour ramener ces
griefs à son cas personnel, elle produit un témoignage d’un délégué syndical
l’ayant assisté à un entretien où on lui reprochait son absentéisme, une
attestation d’une collègue faisant état de propos humiliants tenus par certains
collègues et de débriefings angoissants. Elle présente enfin un certificat
médical mentionnant une intoxication médicamenteuse volontaire et une
proposition de suivi psychiatrique lors de la sortie.La Cour d’appel de Metz la déboute en retenant que si les pièces produites par la salariée tendent à établir des faits laissant présumer des agissements répétés de harcèlement moral de la part de son employeur, l’intéressée en revanche ne produit aucun élément, tel qu’un certificat médical ou même des attestations, susceptible de prouver que le harcèlement moral dont elle a été l’objet était la cause de ses absences répétées ou participait au processus qui les avait générées.
La Cour de cassation reproche à la cour d’appel de n’avoir pas compris le mécanisme institué par l’article L. 1154-1 du Code du travail et d’avoir inversé la charge de la preuve.
On peut, en effet, s’étonner que la cour d’appel n’ait pas compris un processus pourtant largement expliqué par la Cour de cassation. On attend du salarié qu’il présente « des faits précis et concordants » (et non pas des rumeurs - Cass. soc., 9 oct. 2013, no 22-12.288). Dans le cas précis, les faits ne manquaient pas et les juges du fond l’avaient reconnu.
Là s’arrête le travail du salarié. Face à ces faits, pris dans leur ensemble, le juge doit dire s’ils laissent présumer un harcèlement moral. Il prend sa décision seul et n’a pas, à ce stade, ni à laisser l’employeur réfuter chacun des éléments ni à porter un jugement de valeur sur ces faits (Cass. soc., 4 déc. 2013, no 12-19.667).
Si la présomption est établie, la balle est alors dans le camp de l’employeur. C’est à lui de prouver que les faits reprochés n’ont rien à voir avec du harcèlement moral.
Auteur : M.H.
Jurisprudence Sociale Lamy, n° 361
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