12 FÉVRIER 2016 | PAR MICHEL DELÉAN ET MATHILDE MATHIEU
Le nouveau ministre de la justice, Jean-Jacques Urvoas, a
choisi un directeur de cabinet dont l'épouse travaille avec François Pérol, le
banquier au cœur d'une des plus grosses affaires politico-financières du
quinquennat Sarkozy. Questionné sur ce conflit d'intérêts, le ministère a fait
savoir à Mediapart qu'il était d'ores et déjà résolu.
·
Le nouveau ministre
de la justice va devoir ériger une muraille de Chine autour de son bras droit.
Jean-Jacques Urvoas s’est en effet choisi un directeur de cabinet, Thomas
Andrieu, dont l’épouse travaille avec François Pérol, l’ex-numéro deux de
Nicolas Sarkozy à l’Élysée devenu patron du groupe BPCE (Banques populaires-Caisses
d’épargne), soit le bénéficiaire d’un des plus spectaculaires pantouflages de
la République. « So
what ? », diront certains.
Il se trouve que François Pérol a comparu en septembre
dernier devant le tribunal correctionnel de Paris pour « prise illégale
d’intérêts », la justice lui reprochant d’avoir pris la tête de BPCE
en 2009 alors qu’il avait participé, depuis l’Élysée, aux négociations sur la
constitution du groupe bancaire. L’ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy a
certes été relaxé, mais le parquet national financier
(PNF), qui avait requis à l’audience deux ans de prison et l’interdiction
d’exercer tout emploi public, a immédiatement fait appel. En clair, la justice
n’en a pas terminé avec François Pérol, loin de là.
Parce que le dossier est emblématique pour le PNF (né en
2013 du scandale Cahuzac), il sera suivi comme le lait sur le feu par le
cabinet du ministre, susceptible de recevoir des informations clés (calendrier
du second procès, choix stratégiques du parquet général, composition de la cour
d’appel, etc.). Depuis 2013, la loi interdit certes au garde des Sceaux de
donner la moindre consigne aux procureurs dans des affaires individuelles, mais
ces derniers continuent de dépendre hiérarchiquement de leur ministre… Pour
Thomas Andrieu, dont l’épouse occupe précisément le poste de directrice générale adjointe au
comité de direction de BPCE, le conflit d’intérêts est donc évident.
Ou plutôt, il l’était.
Car le cabinet de Jean-Jacques Urvoas, questionné
mercredi 10 février par Mediapart, nous a fait savoir jeudi soir qu’une
décision venait d’être prise pour résoudre ce conflit d’intérêts : Thomas
Andrieu s’abstiendra de connaître de toute question qui toucherait au groupe
BPCE ou à l’un de ses dirigeants ; il ne devra accéder à aucune
information relative à de tels dossiers. En pratique, cela suppose que le
ministre et l’ensemble des conseillers prennent mille précautions, en réunion
de cabinet comme à la machine à café, pour le mettre hors circuit................
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Notre Avis:
Le monde de l'énarchie est vraiment petit !
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