10 juin 2019

Retraite : un bonus-malus pour repousser l’âge de départ à 64 ans ?



|Catherine Gasté|07 juin 2019, 19h42|MAJ : 08 juin 2019, 12h51|28
le parisien

En créant un bonus-malus, l’objectif est de dissuader les assurés de prendre leur retraite dès 62 ans. 

Alors qu’actuellement il faut avoir 62 ans pour faire valoir ses droits, un système pourrait inciter les actifs à travailler jusqu’à 64 ans. Mais les arbitrages ne sont pas encore rendus.
Repousser l’âge de la retraite… Sans le dire. Le gouvernement, qui a promis de ne pas toucher à l’âge symbolique du départ légal à 62 ans conformément à la promesse présidentielle, songerait à créer un « âge pivot » dans la future réforme des retraites. Depuis neuf mois la rumeur revient périodiquement. Cette fois, selon le journal Challenges, les dés seraient jetés : l’exécutif aurait décidé début mai d’inscrire en catimini une nouvelle borne d’âge à 64 ans dans le futur système par points, dont le texte est encore secret. L’objectif de cette mesure étant de dissuader les assurés de prendre leur retraite dès 62 ans.

L’âge pivot peut coexister avec le maintien de l’âge légal à 62 ans. Mais la personne qui décidera de faire valoir ses droits à 62 ans (et non à 64 ans) se verra appliquer automatiquement un malus – une décote – sur le montant de sa pension. Pendant combien de temps, deux ans ou sur l’ensemble de sa retraite ? Mystère. À l’inverse, l’assuré qui décidera de poursuivre son activité au-delà de 64 ans verra le niveau de sa retraite majoré (grâce à un bonus).
Un mécanisme similaire sur les retraites complémentaires
Un mécanisme similaire existe déjà pour les retraites complémentaires. Depuis le 1er janvier 2019, les salariés du secteur privé, nés à partir de 1957, voient leur pension diminuée de 10 % sur une période pouvant aller jusqu’à trois ans s’ils cessent de travailler une fois les conditions d’une retraite à taux plein remplies (42 ans de cotisations). À l’inverse, dans le cas où ils restent en emploi au-delà de la durée de cotisation exigée, le montant de leur retraite est augmenté.
Contrairement à ce qu’affirme Challenges, « les arbitrages n’ont absolument pas été rendus », assure une source élyséenne. Même son de cloche ce vendredi dans l’entourage de la ministre des Solidarités Agnès Buzyn. Même prudence parmi les proches du dossier, qui rappellent les folles rumeurs alimentant pendant près d’un mois le débat autour du financement de la dépendance. « Les fuites et les ballons d’essai vont être de plus en plus nombreux. Nous sommes en pleine période d’arbitrage interministériel, ça va être carnaval », ironise-t-on dans l’entourage du Haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye.
Le 25 avril, lors de sa conférence de sortie du grand débat, Emmanuel Macron avait évoqué la piste d’un possible allongement de la durée de cotisation. S’il a martelé un « Non » ferme à un recul de l’âge légal de la retraite – comme le réclamaient pourtant la droite et le Medef –, le Président a aussi laissé planer un certain flou. « Ce sur quoi peut travailler le gouvernement avec le Parlement, c’est de regarder si on peut allonger la période de référence sans bouger l’âge l’égal, pour avoir un système de décote qui incite à travailler davantage, mais sans forcer tout le monde », a-t-il déclaré.

La piste du bonus-malus évoquée dans plusieurs textes
Ce n’est pas le seul indice à avoir jeté le trouble dans les esprits. Selon un document de travail confidentiel adressé aux partenaires sociaux en janvier dernier, que le Parisien a révélé, la piste d’un bonus-malus dans le futur système de retraite, pour retarder l’âge légal de départ possible à 62 ans, a bien été mise sur la table.
Dans le texte de 14 pages, il est fait état d’un « âge de référence commun à tous » (autrement appelé âge pivot) qui viendrait s’ajouter à l’âge légal de départ à 62 ans : déclenchant soit un bonus, soit un malus « de 3 à 5 % par an en fonction de l’âge de départ ». Et ce n’est pas tout. En mars, la direction des statistiques du ministère de la Santé (Drees) a aussi sorti un document étudiant la piste d’un âge pivot déclenchant une décote (temporaire) sur le montant de la pension, ou une surcote.
« L’âge-pivot est un faux sujet, car dans le futur système c’est le nombre et la valeur des points qui déterminera véritablement l’âge de départ », observe un proche du dossier. Quoi qu’il en soit, il faudra attendre que les arbitrages soient définitivement rendus en coulisse. Jean-Paul Delevoye doit ensuite, d’ici à la fin juin, rendre ses préconisations et lancer cet été, selon nos informations, une nouvelle concertation avec les partenaires sociaux sur les grandes lignes du projet de loi.


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