12 juin 2019

Caisse des dépôts : vers une rupture conventionnelle collective pour les fonctionnaires ?



Anne Fairise,publié le 11/06/2019 à 11:06 , mis à jour le 12/06/2019 à 12:20
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Le 11 juin, la Caisse des Dépôts a soumis à l'avis des syndicats, un projet d'accord comportant un plan de départ volontaire d'un tout nouveau genre pour un établissement public : la rupture conventionnelle collective (RCC).


L'établissement public soumet, aujourd'hui, à l'avis des syndicats un dispositif de rupture conventionnelle collective. L'Express a consulté le projet d'accord.
Journée sous tension à la Caisse des Dépôts. L'institution financière soumet, cet après-midi, à l'avis des syndicats, un projet final d'accord comportant un plan de départ volontaire d'un tout nouveau genre pour un établissement public : la rupture conventionnelle collective (RCC)
Créé en 2017 par les ordonnances Macron, le dispositif qui permet aux entreprises privées de réduire vite leurs effectifs en évitant les contraintes d'un plan social, n'a jamais été appliqué à des fonctionnaires. Mais la "CDC", qui compte 3600 agents publics parmi ses 5800 employés (les autres étant sous contrat de droit privé), en a obtenu l'autorisation grâce à un amendement gouvernemental au projet de loi de transformation de la fonction publique
Jeu d'équilibriste

C'est possiblement une "première" donc pour un établissement public, mais elle est encore virtuelle. D'abord, parce que l'examen parlementaire du projet de loi n'est pas achevé (il reprend le 18 juin au Sénat en première lecture) et qu'il faudra attendre son adoption définitive, puis la promulgation de la loi, pour ouvrir les guichets de départ volontaire. Surtout, parce que le dispositif doit, au préalable, être validé par un accord majoritaire.  
C'est tout l'enjeu de la réunion de ce mardi après-midi, où chaque syndicat doit donner un avis censé l'engager, même s'il ne vaut pas signature finale. Autre difficulté rajoutée à ce jeu d'équilibriste, le projet d'accord, que L'Express a consulté, ne comporte pas que la RCC, mais aussi des préretraites avantageuses (travaillées à 50% mais payées à 80%) et l'engagement de maintenir globalement le volume d'emploi "à l'horizon 2021". La CDC a prévu de compenser les 600-650 départs en retraite prévus, par 500-550 recrutements. 210 autres créations d'emplois sont annoncées pour de nouvelles missions, alors que le "nombre maximal" de départs volontaires est arrêté à 200. 
Le piège de l'accord global
Autrement dit, le choix est cornélien : en cas d'accord majoritaire, toutes les mesures s'appliquent. Sinon, aucune. "Cet accord global est un piège pour les syndicats", martèle Jean-Philippe Gasparotto, secrétaire général de la CGT, et opposant de la première heure à la RCC. Comme le SNUP (Syndicat national unitaire des personnels)-FSU. "Personne n'est dupe. Expérimenter la RCC à la Caisse des dépôts, c'est ouvrir demain la voie à une généralisation dans la fonction publique", reprend le représentant CGT, qui compte contester en justice la base légale de l'accord.  
Dans le camp des syndicats ayant négocié, les positions sont aussi bien arrêtées. La CGC (quatrième organisation avec 12,93%des suffrages fin 2016) est depuis le début favorable à l'ouverture de guichet départs. Tout comme l'Unsa, premier syndicat (23,82%). "Jamais les fonctionnaires n'ont eu d'aussi bonnes conditions de départ. Les avantages de la RCC sont sans commune mesure avec ceux du dispositif de départ volontaire "maison", expérimenté il y a douze ans. Il se résumait à la démission contre une grosse prime", clame Luc Dessenne, secrétaire général de l'Unsa. 
Dans le cadre de la RCC, les indemnités (ici un mois de salaire brut par année, plafonné à 24 mois) sont défiscalisées. Nouveauté pour les fonctionnaires sous statut, le dispositif leur ouvre droit à l'assurance chômage. Et il y a l'accompagnement prévu par la Caisse des dépôts : aide d'un cabinet conseil, soutien à la formation de 5000 euros maximum. 
Du coup, le syndicat CFDT se retrouve en position d'arbitre. Délicat car il avait tapé du poing sur la table pendant la négociation, quand l'accord se résumait pour l'essentiel à des départs volontaires. Déclarant qu'il ne le signerait pas, "d'autant qu'il pourrait entraîner des mesures similaires dans la fonction publique". Depuis, il a obtenu gain de cause sur ses revendications : créations d'emploi, articulation de l'accord avec la gestion prévisionnelle de l'emploi. A la CFDT fonctions publiques, Mylène Jacquot, secrétaire générale, désamorce : "Les équipes veulent se donner du temps pour réfléchir. Cette négociation est spécifique, et n'est pas élargie à la fonction publique". 
La Caisse des dépôts, qui a engrangé un bénéfice net de 1,76 milliard d'euros en 2018, a, elle, déjà prévu l'ouverture des guichets de départs. C'est le 1er octobre prochain. 


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