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Chaque jour, dans le cadre du grand débat national, Le Parisien passe une de vos propositions au crible. Ce lundi, la suppression de jours fériés.
En marge du grand débat national organisé par le gouvernement en réponse au mouvement des Gilets jaunes, Le Parisien invite ses lecteurs à lui envoyer les propositions de lois citoyennes qu’ils souhaiteraient voir émerger. Chaque jour, une partie d’entre elles sont passées au banc d’essai par la rédaction.
Ce lundi, nous nous penchons sur la suppression de jours fériés dans notre calendrier.
De quoi parle-t-on ?
Les jours fériés sont des jours où l’on célèbre des fêtes religieuses, civiles, ou des jours de commémoration d’événements. En France, on en compte 11. Six d’entre eux sont des fêtes religieuses : Noël, le lundi de Pâques, le jeudi de l’Ascension, le lundi de Pentecôte, L’Assomption et la Toussaint. Deux autres dates, le 8 mai et le 11 novembre, commémorent respectivement les armistices de la Seconde et Première Guerre mondiale. Restent le jour de l’An, la fête du Travail - traditionnellement chômée - du 1er mai, et la fête nationale, le 14 juillet.
Notons qu’un jour férié ne signifie pas toujours qu’il est obligatoirement chômé. Une étude menée par l’agence d’intérim Qapa auprès de 4,5 millions de personnes montrait que 2 % d’entre elles travaillaient à ces dates. « Il y a beaucoup d’exceptions : les contrôleurs aériens, les pompiers, les gendarmes, les policiers, les hôpitaux, les activités touristiques et commerciales ne chôment pas les jours fériés. Dans une économie de services comme la nôtre, cela concerne des millions d’emplois », rappelle l’économiste Xavier Timbeau, de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
Combien ça rapporterait ?
Il est compliqué d’évaluer précisément le bénéfice lié à la suppression d’un jour férié. Tout dépend de celui que l’on supprime et du jour de la semaine sur lequel il tombe. Selon l’Insee, l’impact économique d’un lundi ou d’un vendredi n’est pas aussi important que celui d’un jour de milieu de semaine, considéré comme plus productif.
L’impact économique d’une telle mesure dépend aussi de la conjoncture. « C’est une petite mesure qui se mélange dans un océan de plein d’autres, qui peuvent faire monter ou faire baisser la productivité », commente Xavier Timbeau. Selon l’économiste, qui a notamment travaillé sur la question du lundi de Pentecôte comme journée de solidarité, il est au final très difficile de déterminer si une telle mesure permettra d’augmenter la productivité. En 2015, le Medef assurait que le PIB pourrait augmenter d’un point et que 100 000 emplois seraient créés grâce à la suppression de deux jours fériés. Mais plusieurs économistes, à l’époque, avaient contredit ces propos.
Les jours fériés présentent aussi, de leur côté, certains apports économiques. « Ils sont très chargés socialement : il y a d’anciennes fêtes religieuses qui continuent à être habitées de traditions, d’événements et de récupérations d’activités dans des opérations touristiques et commerciales », développe Xavier Timbeau. « Pendant un 14 juillet par exemple, on organise un bal populaire et de nombreuses activités en parallèle. Si on supprime un 15 août, cela créera un pataquès pour toutes les organisations et entreprises qui ont des choses prévues autour de cette date. » Sans oublier les fameux jours fériés du mois de mai, une vraie manne pour le secteur du tourisme qui gagne des clients profitant des ponts.
Déjà testé ?
Le 8 mai, jour de l’armistice de la Seconde Guerre mondiale, avait été déclaré férié en 1953 avant de perdre ce titre en 1959. C’est François Mitterrand qui l’avait rétabli en 1981.
En 2004, le lundi de Pentecôte avait été désigné comme journée de solidarité par défaut. Son principe ? Demander aux salariés de travailler ce jour sans être rémunérés, afin de financer l’autonomie des personnes âgées.
L’obligation de fixer cette journée au lundi de Pentecôte a été supprimée en 2008. Depuis, chaque entreprise applique cette mesure comme elle l’a négocié avec ses salariés. Certains choisissent d’abandonner un jour de congé, d’autres travaillent « gratuitement » sur la date de leur choix. Les recettes de cette journée étaient estimées à 3,1 milliards d’euros en 2017, selon la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
Le Portugal, miné par la récession, a eu l’idée de supprimer quatre jours fériés - deux fêtes religieuses, deux fêtes civiles - pour augmenter sa productivité économique. La mesure, appliquée en 2013, a finalement été retirée en 2016, faute de résultats vraiment concluants.
Qu’en disent les différentes familles politiques ?
La mesure n’a été que rarement abordée par les partis politiques. L’année dernière, Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, et Emmanuel Macron ont tous les deux évoqué « la piste » d’une deuxième journée de solidarité pour financer la prise en charge des personnes âgées.
En 2013, Christian Jacob, alors président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, s’était dit plutôt favorable à l’idée de réduire le nombre de jours fériés à l’année, sans préciser lesquels.
Alors, jouable ou pas ?
- Sur le plan pratique, cette mesure est applicable via un texte de loi, retranscrit dans le Code du Travail. La vraie difficulté serait, en revanche, de choisir quels jours fériés devraient être supprimés.
« Les jours fériés sont très chargés de traditions et de pratique » rappelle Xavier Timbeau. « Supprimer le jour de l’An, Noël, Pâques, le 1er mai, les fêtes nationales ou les armistices, ce serait à chaque fois vu comme une provocation assez importante », résume l’économiste
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