« Der des ders », c'est quasi certain. Mais échec ou succès ? Les organisations patronales et syndicales ont rendez-vous jeudi 22 janvier au siège du Medef afin de tenter de parvenir, enfin, à conclure un accord sur la « modernisation du dialogue social » en entreprise. Concrètement, il s'agit de simplifier et de rationnaliser les organes de représentation du personnel et de lisser les seuils sociaux qui seraient un frein à l'emploi. A la demande du gouvernement, cela fait quatre mois que les partenaires sociaux négocient sur le sujet. Mais, malgré quelques avancées, ça patine. Explication.
Une instance unique dans les entreprises de plus de 11 salariés
A ce stade, les dernières propositions patronales suggèrent de considérablement simplifier la représentation du personnel dans les entreprises. En substance, il n'y aurait plus qu'un seul seuil : celui de 11 salariés. Dans les entreprises de moins de 11 salariés : le Medef et l'UPA (artisans employeurs) - la CGPME y est en revanche hostile - proposent que soient créées des commission paritaires régionales (regroupant des représentants des salariés et des employeurs), extérieures à l'entreprise et n'ayant pas vocation à y entrer, chargées d'une mission d'information et de soutien sur les questions sociales aux salariés et aux entreprises.
Dans les entreprises de plus de 11 salariés, il serait institué un « Conseil d'entreprise », une instance unique destinée à remplacer toutes les institutions actuellement existantes : délégués du personnel, comité d'entreprise, comité hygiène-sécurité et conditions de travail (CHSCT), voire délégués syndicaux. A noter que dans les entreprises de plus de 300 salariés, une commission « hygiène » serait obligatoire. Mais elle n'aurait pas la personnalité morale (elle ne pourra donc pas ester en justice) et resterait totalement intégrée au « Conseil d'entreprise ».
Voilà le projet patronal. Du côté des organisations syndicales, FO et la CGT disent « niet » à ce qu'elles considèrent comme une véritable régression sociale. En revanche, CFDT, CFTC et CFE-CGC sont prêtes à accepter l'instauration d'un Conseil d'entreprise mais à la condition expresse que cette nouvelle instance reprenne toutes les prérogatives détenues par les actuelles institutions. Par exemple, elles demandent que la commission qui remplacera l'actuel CHSCT garde la personnalité morale.
Elles souhaitent aussi que les délégués syndicaux préservent leur autonomie en matière de négociation d'accords dans l'entreprise. En d'autres termes : qu'il n'aient aucun compte à rendre au Conseil d'entreprise. Les trois syndicats sont également contre l'idée - prévue dans le texte patronale - que l'on puisse rendre triennales les actuelles négociations annuelles obligatoires, par exemple celles sur les salaires.
Les revendications syndicales
De même, il existe des « blocages » concernant la représentation dans les entreprises de moins de 11 salariés. La CFDT se félicite qu'une telle représentation soit généralisée mais elle demande que ces commissions paritaires puissent exercer des missions de « médiation » pour prévenir d'éventuels conflits dans les entreprises. La CFTC, de son côté, réclame un financement spécifique dédié au fonctionnement de ces commissions. Or, le Medef a promis à ses troupes qu'il n'y aurait aucun coût supplémentaire. L'organisation patronale se proposait donc d'utiliser une partie de l'actuelle cotisation de 0,016% - créée après la réforme de la formation professionnelle - dédiées au fond paritaire pour le financement des organisations patronales et syndicales. Mais, pour la CFTC, ces sommes sont déjà utilisées...
Nous en sommes donc là. L'enjeu de jeudi prochain est de savoir sur quel point le texte Medef/UPA aura pu évoluer pour satisfaire les demandes des syndicats.
Les marges de manœuvre sont extrêmement réduites. Ce mardi, le président du Medef Pierre Gattaz a été très clair : « je ne signerai pas un accord à n'importe quel prix, surtout vis-à-vis de nos TPE ». En clair, Pierre Gattaz sait très bien que certaines des fédérations adhérentes au Medef - la Fédération française du bâtiment notamment - n'accepteront jamais que les commissions paritaires prévues pour assurer la représentation dans les établissements de moins de 11 salariés soient « intrusives », c'est-a-dire qu'elle puissent rentrer dans les entreprises.
Nous en sommes donc là. L'enjeu de jeudi prochain est de savoir sur quel point le texte Medef/UPA aura pu évoluer pour satisfaire les demandes des syndicats.
Les marges de manœuvre sont extrêmement réduites. Ce mardi, le président du Medef Pierre Gattaz a été très clair : « je ne signerai pas un accord à n'importe quel prix, surtout vis-à-vis de nos TPE ». En clair, Pierre Gattaz sait très bien que certaines des fédérations adhérentes au Medef - la Fédération française du bâtiment notamment - n'accepteront jamais que les commissions paritaires prévues pour assurer la représentation dans les établissements de moins de 11 salariés soient « intrusives », c'est-a-dire qu'elle puissent rentrer dans les entreprises.
En interne, le Medef a déjà eu beaucoup de mal à s'entendre pour proposer un texte à la négociation. Il y a des clivages au sein de l'organisation. C'est ce qui rend les choses compliquées. Outre la fédération du bâtiment, celle de la Propreté aussi ne veut pas entendre parler de présence syndicales dans les petites entreprises. L'exercice est donc très difficile pour la délégation patronale dont le mandat est limité et qui ne peut donc pas trop « lâcher » aux syndicats.
En cas d'échec, le Medef perdra tout car les propositions patronales ne seront pas reprises dans une loi.
Mais la pression est forte, lundi le président de la République a été très clair : « Un échec aurait des conséquences qui iraient bien au-delà de cette réforme. Vous avez un rendez-vous jeudi et je pense que c'est le dernier". Et d'ajouter sibyllin : « Ne demandons pas à la démocratie politique de régler ce que la démocratie sociale ne serait pas capable de faire elle-même ».Des propos qui n'ont pas manqué d'inquiéter. Un conseiller gouvernemental décrypte pour La Tribune :
« cela signifie que le Medef doit faire bouger les lignes pour qu'il y ait un accord. Il n'a pas intérêt à jouer la politique du pire en espérant que le gouvernement reprendra ses proposition dans un projet de loi s'il n'y pas d'accord. Nous ne jouerons pas les supplétifs. Si nous reprenons la main en cas d'échec des partenaires sociaux, ce sera avec nos propres propositions et pas celles du Medef. Ce dernier a donc intérêt à bien réfléchir. Même s'il fait des concessions, il obtiendra ce dont il rêve depuis longtemps, à savoir une simplification drastique des instances de représentation du personnel. A lui donc de jouer ».
Le message est clair. Au gouvernement on estime qu'une partie du camp syndical a joué le jeu en acceptant beaucoup. Au Medef donc de faire preuve de pragmatisme et de lâcher du lest... sous peine de tout perdre.
De fait, qui aurait cru il y a encore quelques années que des syndicats auraient été prêts à accepter la disparition du Comité d'entreprise institué en 1945, du CHSCT dont le rôle et les missions avaient été confortés par les lois Auroux de 1982, voire la remise en cause des prérogatives des sections syndicales légalisées de haute lutte en ... 1968 ? Mine de rien, la réforme qui se prépare avec l'éventuelle conclusion d'un accord jeudi soir, est un véritable coup de tonnerre pour l'ensemble du droit du travail.
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