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14 avril 2016
CFTC BPCE sa, infos Groupe: Aux prud'hommes, un ex-dirigeant de Natixis lanceur d'alerte veut 1 million d'euros
lexpress.fr
Par Claire Padych, publié le
05/04/2016 à 20:12
Aux prudhommes de Paris, ce 5 avril 2016, un ex-dirigeant de Natixis, lanceur d'alerte, réclame 1,25 million d'euros à la banque qui l'a licencié. La banque le traite de maître-chanteur.
REUTERS/Charles Platiau
Licencié pour "motif personnel", Abdel, ex-directeur des contrôles et des risques chez Natixis, veut faire reconnaître sa qualité de lanceur d'alerte. S'estimant "cramé" dans la profession, il réclame sa réintégration ou de l'argent. La banque le traite de maître-chanteur. L'Express a assisté à l'audience aux prud'hommes.
Les conflits qui animent les prud'hommes reflètent quotidiennement notre histoire sociale. L'audience en bureau de jugement est publique. Régulièrement, une journaliste de L'Express assiste aux débats.
Paris, tribunal des prud'hommes de la rue Louis Blanc, section encadrement, le 5 avril 2016, 16h03.
Le président est entouré de trois conseillers. Deux avocats prennent place de part et d'autre de la barre pour la dernière affaire de la journée. Une autre avocate est dans la salle aux côtés d'Abdel, un autre avocat est également présent dans le tribunal aux côtés de dirigeants de Natixis Asset Management (NAM).
L'avocat d'Abdel:
"Mon client est âgé de 52 ans, je demande la réintégration à titre principal."
Le président:
"Je vais d'abord rappeler quelques éléments du dossier. Votre client a bien été engagé le 16 septembre 1999? Il était directeur de la conformité, des contrôles et des risques?"
L'avocat d'Abdel:
"Oui."
Le président:
"Le dernier jour travaillé? Le 12 novembre 2014?"
L'avocat d'Abdel:
"C'est cela."
Le président:
"Plus de 10 salariés?"
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Plus de 600."
Le président:
"La moyenne de son salaire?"
L'avocat d'Abdel:
"20 527,92 euros."
Le président:
"C'est un licenciement?"
L'avocat d'Abdel:
"Pour
motif personnel
."
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Pour motif disciplinaire."
L'avocat d'Abdel:
"Nous l'apprenons aujourd'hui."
Le président:
"Madame la greffière, veuillez noter licenciement disciplinaire pour faute simple. Un article 700?"
L'avocat d'Abdel:
"5000 euros."
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Un article de 3000 euros pour Natixis."
Le président:
"Allez à l'essentiel plutôt que nous dépeindre le paysage."
L'avocat d'Abdel:
"Monsieur le président, il faut aussi que je vous parle du paysage. Il y a un débat dans quelques jours à l'Assemblée Nationale..."
Le président:
"
Panama
?"
L'avocat d'Abdel:
"Non, le
projet de loi Sapin qui va consolider la protection des lanceurs d'alerte
. Si cette autorité avait été instituée précédemment, elle aurait protégé mon client. Celui-ci n'aurait jamais été licencié. Par ailleurs, Pascal Voisin [directeur général de NAM, NDLR] a brutalement démissionné de ses fonctions [le 10 mars 2016]. La presse économique s'en est émue. Cette démission est en lien avec l'enquête de l'Autorité des marchés financiers (AMF). De plus, le magazine
Que Choisir?
a lancé un appel à témoignages dans l'hypothèse d'une
class action
..."
Le président:
"Je préfère action collective."
L'avocat d'Abdel:
"Après 16 ans de carrière, mon client de 52 ans avait 55 collaborateurs et a fait un parcours professionnel impeccable et sans faille. Sa carrière est exceptionnelle. Sont présents dans la salle d'audience deux dirigeants de Natixis, des gens extrêmement affairés que l'on n'a pas l'habitude de voir aux prud'hommes. En réalité, ils ont la crainte de l'enquête en cours."
Le président:
"Il est dommage que l'affaire ait commencé à être plaidée sans que cette information m'ait été donnée. J'aurais aimé les entendre comme témoins. Poursuivez."
L'avocat d'Abdel:
"Le rôle de mon client n'est pas d'être complaisant mais de mettre le doigt là où cela fait mal. C'est ce qu'il a fait. Le responsable de la conformité et du contrôle interne (RCCI) a pour objectif de contrôler que les pratiques de Natixis sont conformes à la législation et aux principes régissant les institutions financières. Il a découvert un système interne opaque à l'intérieur du groupe et l'a dénoncé car il ne respectait pas les intérêts des clients et des actionnaires. Il alerte à trois reprises. Que lui reproche-t-on? De ne pas avoir
lancé l'alerte
suffisamment tôt. Ses alertes sont décrites, documentées."
Le président:
"A quelle date remonte la première alerte?"
L'avocat d'Abdel:
"Le 18 octobre 2011, puis il a établi une nouvelle note le 29 mai 2012. L'autorité européenne des marchés financiers (Esma) va lui donner raison. Sa direction met un genou à terre. Le dernier épisode avec le Crédit Suisse lui sera fatal. Il sera licencié pour motif personnel. On lui dira qu'il a eu un "comportement inapproprié". Qu'est-ce que cela signifie en droit du travail? Natixis l'a licencié moins de 15 jours après sa dernière alerte. Si vous ne prononcez pas la nullité du licenciement et ne le réintégrez pas, je ne vois pas quel conseil des prud'hommes réintégrera un lanceur d'alerte."
Le président:
"Vos autres demandes?"
L'avocat d'Abdel:
"A titre subsidiaire environ 5 ans de salaire, 1,25 million d'euros. Il est "cramé" dans la profession alors qu'il a fait son devoir."
Un conseiller:
"C'était un correspondant officiel de l'AMF?"
L'avocat d'Abdel:
"Oui. En tant que RCCI, il engage sa responsabilité personnelle et professionnelle non seulement auprès de son employeur mais aussi de l'AMF. Il a une carte de RCCI délivrée par l'AMF."
Le président:
"D'autres demandes?"
L'avocat d'Abdel indique les autres demandes (1)
: "Je souhaite aussi 148 000 euros de dommages et intérêts en réparation de la perte d'une chance d'obtenir les LTIP (LongTerm Incentive Plan, 2)."
Le président (à l'avocat de NAM):
"C'est à vous."
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Je vais demander à titre principal de rejeter la demande de nullité et de réintégration et à titre subsidiaire de rejeter la demande de
licenciement sans cause réelle et sérieuse
. J'ai rarement vu un tel niveau de cynisme aux prud'hommes. Il faut démontrer la bonne foi et le désintéressement. Que voit-on? Un homme qui rêve d'accéder au comité exécutif (Comex). Il rédige plusieurs demandes en ce sens. Il ne comprend pas cette qualification de maître-chanteur, mais il fait du chantage pour accéder au Comex. Il se prévaut de la loi du 6 décembre 2013 [
relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique
, NDLR] mais était-il de bonne foi?"
Le président:
"Deux critères sont cumulatifs pour le lanceur d'alerte: des révélations de bonne foi mais aussi de dénoncer un crime ou un délit."
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Trois points. Qui est NAM? Une société qui emploie 656 personnes et dont 8,6% de l'effectif est dédiée au contrôle. C'est une société vertueuse qui agit en transparence. Deuxième point, on nous dit que le salarié était isolé et harcelé? En aucun cas. Il a été promu, il a participé à 72 réunions au sein du Comex, il gérait 13 millions d'euros de budget. Troisième point: qui est cet homme? C'était un directeur très puissant mais avec des problèmes relationnels avec ses pairs et ses subordonnés. C'est une ombre au tableau."
Le président:
"Dire qu'il était peu affable dans ses relations n'est pas l'objet de votre présence ici!"
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Il voulait quitter ses fonctions de directeur risques, il voulait évoluer vers d'autres fonctions de pilotage, de développement. Il a cherché à quitter ses fonctions de contrôle."
Le président:
"Vous êtes d'accord avec le fait qu'il a dénoncé un crime ou un délit?"
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Il n'y a pas de crime ni de délit, il n'était pas de bonne foi. Ce n'est pas un lanceur d'alerte. Il indique le 14 septembre qu'il découvre les marges de facturation. Il était au coeur de l'entreprise. Enfin, lorsqu'on l'a
convoqué à l'entretien de licenciement
, il est en arrêt maladie. Mais il essaye de
négocier un départ
avec le supérieur de son N+1. L'entreprise a refusé."
Le président:
"D'autres éléments?"
L'avocat de Natixis Asset Management:
"J'apprends qu'une plainte au pénal est susceptible d'être déposée. Mais il n'y a rien dans le dossier. Et les éléments donnés par la presse sont totalement faux. Vous savez, j'ai beaucoup d'admiration pour les lanceurs d'alerte comme Irène Frachon (3)..."
Le président:
"Pitié..."
L'avocat de Natixis Asset Management:
"Mais l'élément sur lequel vous devrez trancher lors des débats est la notion de bonne foi. Dans ce cas, le salarié était-il de bonne foi ou a-t-il agit dans son intérêt personnel et financier car il connaissait les faits qui lui étaient reprochés?"
17h22. Le président:
"Les débats sont clos. Prononcé le 3 mai."
(1) 492 670,08 euros pour caractère vexatoire du licenciement, 142 130,30 euros de rémunération variable pour la période du 1er janvier 2014 au 12 novembre 2014 et 14 213,03 euros de congés payés afférents, 37 503 euros d'indemnité compensatrice de préavis pour la période du 13 novembre au 11 février 2015 et 3750,30 euros de congés payés afférents.
(2) Compte-tenu de son haut niveau de responsabilité, Abdel bénéficiait d'un
Long term incentive plan
(LTIP) destiné à récompenser la fidélité des cadres de haut niveau envers leur employeur. Cet avantage est perdu en cas de licenciement.
(3) Notamment à l'origine du scandale du Médiator.
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