Par Aurélie Blondel,publié
le 20/12/2018 à 07:00
lexpress
Durant cinq mois, les citoyens étaient
invités à s'exprimer sur les changements à venir. Voici leurs principales
craintes.
Des espoirs, mais aussi des inquiétudes.
Le sentiment des citoyens consultés sur le big bang annoncé des retraites est partagé, selon le bilan de la consultation
en ligne lancée par le haut-commissaire à la réforme, Jean-Paul
Delevoye, présenté le 13 décembre. Le dispositif de consultation en ligne et
d'ateliers en régions avait été lancé en mai dernier. Après cinq mois, 35 273
contributions ont été recensées.
Percevant le dispositif actuel comme
"complexe" et "illisible", les citoyens se disent
globalement favorables à l'instauration d'un système universel de retraite.
Mais au-delà de cette adhésion à l'idée que les règles doivent être simplifiées
et harmonisées, la réforme inquiète. Si le gouvernement a d'ores et déjà
présenté les grandes lignes du futur
dispositif, de nombreuses questions demeurent. "Chacun mesure
qu'il faut changer le système, mais l'hypothèse de l'inconnu tétanise",
résume Jean-Paul Delevoye.
1. Les
pensions vont-elles baisser?
"Je suis toujours aussi inquiète,
je pense que l'objectif est que les pensions coûtent moins cher." Cette
appréhension partagée par Anne-Marie, une Cannoise de 64 ans, lors d'un atelier
retraites en région, est loin d'être isolée. La question des futurs montants
des pensions arrive en tête des préoccupations des participants, qui souhaitent
éviter que l'harmonisation ne rime avec "nivellement par le bas". Si
l'équipe qui prépare la réforme martèle que celle-ci n'a pas vocation à
réaliser des économies, contrairement aux précédentes réformes, il semble que
les citoyens consultés soient comme Saint-Thomas...
2. Qui dit
que la réforme ne sera pas remise en cause?
Autre doute souvent très formulé par les
citoyens: les changements décidés ne seront-ils pas remis en cause à chaque
changement de gouvernement? L'idée qu'aucune réforme ne résiste aux alternances
politiques semble ancrée dans les esprits en raison, notamment, de la fréquence
à laquelle les règles de la retraite ont été revues ces deux dernières décennies.
"Si cette réforme me concernera?
Non, je suis persuadée que les règles auront encore changé d'ici là, vous
imaginez le nombre de présidents qu'il y aura jusqu'à ma retraite?",
témoignait ainsi Mélanie, 27 ans, lors d'un atelier. Pour Jean-Philippe, un
autre participant âgé lui de 47 ans, il faut absolument "une commission de
contrôle" sur le long terme, "pour que ce ne soit pas celui qui crie
le plus fort dans la rue qui obtient le plus", et que les gouvernements
successifs ne puissent pas rapidement recréer des spécificités dans le système
harmonisé, cédant aux demandes des uns ou des autres.
Dans le cadre de la consultation menée
par les équipes du haut-commissariat, 15 personnes ont été formées pendant
trois semaines aux questions de retraite et conviées à remettre un "avis
citoyen" sur les conditions de la confiance dans le système des retraites.
Ce jury citoyen a lui aussi évoqué cette inquiétude. "La moitié du groupe
propose que les principes fondamentaux [du nouveau système] soient inscrits
dans la Constitution: un système par répartition, universel et solidaire",
indique l'avis.
Cette question de la pérennité de la
réforme paraît préoccuper tout autant Jean-Paul Delevoye. Évoquant une
"angoisse", il a indiqué que son équipe réfléchissait à la mise en
place de "règles d'or" pour garantir l'équité entre les générations.
3. Que vont
devenir mes trimestres et points acquis?
Comment seront calculées les pensions de
ceux qui auront acquis des droits à la retraite à la fois dans l'ancien et le
nouveau système? La question ne figurait pas parmi les thématiques de la
plateforme et des ateliers. Cela n'a pas empêché les citoyens d'exprimer leurs
craintes tout au long du processus de consultation. "Moi je suis en milieu
de carrière, la transition, c'est ce que je crains le plus", dit ainsi
Lætitia, fonctionnaire hospitalier de 46 ans.
C'est le jury citoyen qui a le plus
insisté sur ce point. "Allons-nous perdre une partie des droits que nous
avons acquis?", demande-t-il, estimant que "la phase de transition
est cruciale pour avoir confiance dans le système et dans sa propre
retraite". Comment les trimestres seront-ils convertis en points? Quelle
sera la durée de la transition? Le rythme sera-t-il le même pour le public et
le privé? Qui seront nos référents pendant la transition, si ce ne sont plus
les caisses de retraite initiales? Autant d'interrogations qui taraudent ce
jury.
Il demande en outre à ce que chacun
puisse vérifier qu'il n'y perdra pas à la conversion, par exemple via un
simulateur. Le haut-commissaire a promis qu'il serait disponible une fois la
loi votée, pour que chacun puisse faire ses calculs avant l'entrée en vigueur
de la réforme et qu'un outil de "médiation" serait mis sur pied pour
permettre à quiconque estimerait avoir été lésé de se manifester.
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