Pour vous protéger d'une éventuelle
intrusion de votre employeur, commencez votre SMS par le mot «perso».
Explication avec un avocat spécialiste du droit du travail.
Voilà une décision qui va forcément changer le
quotidien de nombreux Français. Les employeurs sont autorisés à lire vos SMS
privés que vous envoyez depuis votre téléphone portable professionnel, selon un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de
cassation. Une décision «destinée à faire jurisprudence» pour tous les
salariés à qui l'employeur a confié un téléphone portable professionnel. La plus
haute juridiction de l'ordre judiciaire considère que le portable professionnel
est un outil de travail et que les SMS envoyés ou reçus par cet appareil «sont présumés avoir un
caractère professionnel». «Cette jurisprudence est cohérente avec celle rendue
sur les emails et fichiers informatiques», réagit Eric Rocheblave, avocat
spécialisé en droit du travail. Il y a près de deux ans, la Cour de cassation
avait pris une décision similaire concernant les mails privés envoyés depuis la
messagerie professionnelle des salariés.
Concrètement, votre employeur peut vérifier vos
SMS en prenant votre téléphone professionnel ou bien installer un logiciel dans
chaque appareil pour extraire les messages à distance ou consulter les appels
vocaux. Et ce, sans vous informer. Deux conditions sont toutefois requises: que
l'employeur puisse justifier de cette mesure et que le salarié n'ait pas pris
soin de préciser que le texte est personnel. «C'est une décision qui ne porte
pas du tout atteinte à la vie privée à partir du moment où ces conditions sont
réunies, explique Eric Rocheblave. Dans le cas présent, on est dans un monde
professionnel. On est là pour travailler. L'employeur peut fouiller les outils
professionnels mis à dispositif de ses salariés à partir du moment où il est
légitime, comme contrôler les sacs à l'entrée du bâtiment dans le cadre de
mesures de sécurité. Pour le reste, il doit disposer d'indices qui justifient
que le salarié a porté à son atteinte (insultes, viol de clause de
confidentialité....)».
C'est comme cela qu'une filiale de la Société
générale a remporté un procès contre l'un de ses concurrents. Newedge reprochait
au broker américain d'avoir déchauché «un grand nombre» de ses salariés. Et pour
prouver ses dires, la société de courtage a transmis à la justice plusieurs SMS
échangés entre ses anciens employés qui évoquaient leur départ concerté de
l'entreprise. Et pour la Cour de cassation, comme la Cour d'appel de Paris, leur
utilisation ne peut être utilisée comme un «processus déloyal» ni «être
assimilée à l'enregistrement d'une communication téléphonique privée effectuée à
l'insu de l'auteur des propos».
Du coup, si un salarié ne souhaite pas qu'un
simple SMS soit utilisé contre lui, il devra préciser au début de chaque message
les mots «personnel» ou «perso». Et dans ce cas, l'employeur n'aura plus le
droit de lire le message, même envoyé depuis le téléphone professionnel, sans
s'être assuré que vous soyiez présent. «Ajouter ce terme «perso» ne protège donc
pas à 100% le salarié, précise Éric Rocheblave. Il permet juste à l'employé
d'empêcher l'employeur d'utiliser ce message contre vous». Une contrainte qui
incitera sans doute les salariés à préférer leur téléphone portable personnel
pour envoyer des messages privés.
Enfin, en cas de fusion des lignes
personnelles et professionnelles - si elle est autorisée par l'employeur -,
c'est la deuxième qui a priorité sur la première. «A partir du moment où votre
employeur paie pour le téléphone portable, il est en mesure d'exiger une
distinction entre les messages privés et professionnels», conclut Eric
Rocheblave.
Le Figaro.fr
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