Les echos:
La fusion Agirc-Arrco
va pénaliser les cadres les moins bien payés
LE CERCLE/POINT DE VUE - Avec la fusion des deux caisses de retraite
complémentaire Agirc et Arrco, les cadres rémunérés en dessous de certains
seuils risquent de se retrouver lésés.
Décidée par les partenaires sociaux dans le cadre d’un
accord daté du 30 octobre 2015, la fusion des deux caisses de retraite complémentaire -
Agirc et Arrco - prendra effet au 1er janvier 2019.
À cette date, la retraite des salariés et des cadres
dépendra d’une seule et même caisse nommée pour l’occasion «Agirc-Arrco». Bien
que cette appellation laisse sous-entendre une continuité dans la gestion des
caisses de retraite, il en sera tout autre pour les sociétaires de la future
Agirc-Arrco qui verront le système de calcul de leurs droits être uniformisé.
Cette évolution de la gestion des retraites
complémentaires entend bouleverser un système unique en Europe auquel les
Français restent très fortement attachés et dont les répercussions ne pourront
être évaluées que sur le moyen terme.
Deux objectifs
Si cette réforme structurelle s’inscrit dans la lignée
des mesures entreprises depuis 10 ans pour réviser le système de retraite
français, elle poursuit également deux objectifs essentiels.
Tout d’abord, celui de simplifier la gestion des
retraites complémentaires obligatoires via l’uniformisation des cotisations de
ces catégories socioprofessionnelles en deux tranches, celleconcernant les
revenus allant jusqu’à 39.000 euros brut annuel (tranche 1) et celle concernant
les revenus qui y sont supérieurs (tranche 2).
Ensuite, celui de mutualiser les ressources
financières des deux caisses et, avec cela, sauver l’Agirc
dont le régime unique en Europe est en difficulté, en raison du vieillissement
de ses cotisants et du ratio actifs/retraités trop bas pour assurer la
continuité du versement des pensions aux ayants droit.
Pour autant, sauvetage et simplification ne font pas
bon ménage, et si ces deux mesures sont nécessaires, faire converger deux
approches différenciées du calcul des retraites ne peut se faire qu’au
détriment d’une des catégories socioprofessionnelles concernées.
Suppression de la GMP
À ce jeu, ce sont donc les cadres dont les revenus
sont inférieurs ou s’établissent légèrement au-dessus des 39.000 euros brut
annuels qui pourraient se retrouver lésés par cette mesure. Pour l’expliquer,
il faut prendre en compte deux facteurs.
Tout salarié est soumis à une cotisation en euros
variant en fonction de son revenu (7,75 % pour la part du salaire jusqu’à
39.000 euros, et 20,25 % au-dessus). Le montant cotisé à l’année permettra
ensuite d’acheter des points, et c’est la somme de ces points cumulés et leur
valeur qui déterminera la retraite complémentaire que recevra le cadre aux
termes de son activité professionnelle.
Légalement, le cadre est tenu d’obtenir un minimum de
120 points de retraite dans l’année, et c’est l’Agirc qui détermine le montant
minimal à cotiser pour acquérir ces points. En 2017, le seuil minimum de
salaire a été fixé à hauteur de 43.337,76 euros brut dans l’année. Pour tous
les cadres se trouvant en deçà, une compensation leur était attribuée, la
garantie minimale de points (GMP) permettant d’atteindre les 120 points
demandés.
La réforme Agirc-Arrco prévoit tout bonnement la
suppression de la GMP, ce qui signifie que les cadres avec un salaire en dessous
de ce seuil se trouveront pénalisés. Par ailleurs, au 1er janvier 2019, les
points Agirc vont être convertis en points Agirc-Arrco et se baseront sur une
valeur équivalente au point Arrco. Au moment de cette transformation, la valeur
en euros des droits acquis sera maintenue. Toutefois, il est aujourd’hui
difficile de savoir si cette équivalence des droits perdurera sur le long
terme.
Il est difficile de ne pas y voir le début d’un
bouleversement profond du système de retraite à la française à bout de souffle.
Cette fusion de deux entités différenciées s’annonce comme un avant-goût de la
réforme des retraites voulue par le Président Emmanuel Macron et prévue pour
l’année 2019. Cette réforme vise à instaurer un régime vieillesse de base
unique en points et sonnerait le glas des 37 régimes spéciaux de retraite.
Christel Bonnet est consultante
retraite chez Mercer France.
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