7 août 2019

Les cinq dangers qui planent sur les banques européennes



L'année 2019 s'annonce plus compliquée que prévu pour les banques européennes. Outre l'accentuation de la politique de taux négatifs de la BCE qui s'annonce, la conjoncture économique risque de leur être moins favorable
La a ouvert la porte à une nouvelle baisse du taux de dépôts négatif imputé aux réserves excédentaires que les banques placent à ses guichets chaque jour.
les Echos.fr
Publié à 19h03
Mis à jour à 19h27

2019 pourrait être une année  plus compliquée que prévu pour les banques européennes. Outre la baisse des taux d'intérêt annoncée par la Réserve fédérale américaine et celle qui se profile en Europe, les établissements voient l'environnement économique s'assombrir et la concurrence se muscler. Revue des multiples défis à relever.
 1 Les taux négatifs rognent les marges
Le premier défi des banques consiste à continuer d'engranger des bénéfices dans un monde où, sous l'influence de la politique monétaire accommodante de la Banque centrale européenne (BCE), l'argent est devenu quasiment gratuit. De fait, sous l'influence du « QE » (pour « quantitative easing »), les banques qui transforment de la ressource à court terme en crédit à long terme ont vu leurs marges de crédit s'aplatir. Ce n'est pas nouveau mais, dans l'esprit des banquiers, cette période « anormale » était sur le point de se refermer. Or, ces derniers mois, sur fond de dégradation des perspectives économiques, leur espoir de voir les taux remonter s'est envolé. Pire, pour les banquiers, la BCE a ouvert la porte à une nouvelle baisse du taux de dépôts négatif imputé aux réserves excédentaires que les banques placent auprès d'elle chaque jour. Jusqu'à présent, les établissements n'ont répercuté ces taux négatifs qu'aux dépôts de leurs clients entreprises. En Suisse et désormais en France, certaines banques privées comme UBS ou Lombard Odier changent toutefois de braquet, en facturant les dépôts trop abondants de leurs clients particuliers. Ce n'est sans doute qu'un début.
2 Les nuages conjoncturels
Depuis quelques années, les banques européennes ont bénéficié d'un phénomène extraordinaire : le coût du risque reste collé à un plancher extrêmement bas. Autrement dit, les faillites sont rares, les clients restent solvables, le risque de prêter de l'argent est quasiment nul. Un scénario à vrai dire anormal, qui doit beaucoup à la politique monétaire de la BCE. Compte tenu des incertitudes conjoncturelles - illustrées mercredi par la baisse de 1,5 % de la production industrielle allemande en juin - ceci pourrait changer. Mercredi,  Commerzbank a fait état d'un doublement du coût du risque en hausse au deuxième trimestre, évoquant des « cas individuels ». En France, les banques ont vécu le même sort,  Crédit Agricole observant par exemple une hausse de 60 % de son coût du risque. Là aussi, on évoque poliment des « dossiers de place » sans les nommer, mais la procédure de sauvegarde du groupe de distribution Rallye ou le redressement judiciaire de l'équipementier pétrolier Bourbon devraient logiquement en faire partie. Alors que les tensions commerciales et géopolitiques s'accentuent, ce genre de cas individuels menacent de se généraliser. Pour l'instant, pas de signe de ralentissement en vue : dans les banques la machine à crédit tourne toujours à plein régime. Au premier semestre, UniCredit a toutefois déploré une chute brutale de sa production de crédits de 14 %.
 3 Le nouveau paradigme bancaire
Avant la crise, l'industrie bancaire affichait une croissance de 5 à 6 % par an. Depuis cinq ans, elle se limite à 2 % à l'échelle mondiale, selon un rapport de McKinsey. Or, sur fond de révolution technologique, les banques voient leur statut d'intermédiaire financier de plus en plus menacé. « Les forces duales de l'innovation technologique (et des données) et les changements dans l'environnement réglementaire et plus largement sociopolitique ouvrent des pans de ce système d'intermédiation financière à des nouveaux entrants », constate le cabinet. Dans les paiements, des géants comme PayPal, Stripe ou AliPay se sont ainsi imposés en quelques années. Et Facebook, avec son portefeuille Calibra, menace. Dans la banque de détail, des néobanques (N26 ou Revolut) drainent aussi une clientèle croissante. Selon une estimation d'ATKearney, d'ici à 2023, de 50 à 85 millions d'Européens seront clients de ces néobanques, soit environ 20 % de la population de plus de 14 ans. « Les banques traditionnelles seront sous pression pour trouver des partenaires ou se réinventer », juge le cabinet de conseil. D'autant plus que cette concurrence concerne aussi de plus en plus la banque d'entreprise.
4 La contrainte réglementaire
Depuis la crise, les autorités n'ont cessé de renforcer l'arsenal réglementaire pour discipliner une industrie exposée à des dérives. Les banques françaises, pour ne citer qu'elles, ont plus que doublé leurs fonds propres entre la crise financière et 2016, à 296 milliards d'euros, selon la Banque de France. Or, ce mouvement n'est pas terminé. Outre des évolutions comptables exigeantes en capitaux (IFRS 16), les banques européennes sont confrontées à la transposition des  règles prudentielles de Bâle III, qui viendrait augmenter en moyenne de 24 % leurs exigences en capital, soit 135 milliards d'euros, selon les estimations de l'Autorité bancaire européenne. « Cet accord se traduirait par une rupture d'égalité des conditions de concurrence et de rentabilité avec les banques américaines, qui verront leurs exigences de capital augmenter de 1,5 % seulement », ont critiqué en juillet les présidents des fédérations bancaires française (FBF) et allemande (BDB) dans « Les Echos ». Mais d'autres évolutions réglementaires pèsent aussi sur le modèle économique des banques : DSP2 (paiements), MiFID II (marchés financiers), RGPD (protection des données), etc.
5 Le risque de blanchiment
En Europe, la vague de litiges hérités de la crise financière semble enfin toucher à sa fin. Mais les amendes liées à la crise des subprimes et aux manipulations des indices Libor et Euribor laissent la place à d'autres affaires qui pourraient se révéler tout aussi coûteuses pour les banques. Visées par les Etats européens qui bataillent contre la fraude fiscale, UBS et HSBC se retrouvent par exemple plombées par de lourdes amendes. Mardi, la banque britannique a ainsi accepté de verser près de 300 millions d'euros pour clore une enquête pénale pour « blanchiment » et « fraude fiscale » en Belgique. Les banques nordiques, au premier du rang desquelles figure  Danske Bank, sont aussi dans le viseur des autorités américaines et européennes pour avoir fait transiter des sommes gigantesques d'origine suspecte. Les scandales de blanchiment pourraient aussi éclabousser les banques néerlandaises : mercredi, ABN Amro a passé une provision de 114 millions d'euros pour faire face à une analyse de 5 millions de comptes dans sa banque de détail dans le cadre d'investigations liées à des soupçons de blanchiment d'argent.
Thibaut Madelin et Sharon Wajsbrot
Notre avis:
  • Et pendant ce temps à BPCE Sa, on attend " OPAL" en Septembre !!!


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