Des moyens de fonctionnement réduits
Les élus du CSE sont moins nombreux que l'addition CE + DP + CHSCT.
En outre, dans les entreprises de plus de 300 salariés, le nombre de mandats est strictement limité à trois.
Dans les entreprises de 50 à 300 salariés, il est possible de déroger dans l'accord préélectoral à cette limitation
Les entreprises de moins de 50 salariés ne sont pas soumises à cette limitation (C. trav., art. L. 2314-33 ; Rép. min. no 03267, JO Sénat, 17 janv. 2019, p. 338).
Autre changement de taille : les suppléants n'assistent plus aux réunions, sauf pour remplacer un titulaire.
Les représentants du personnel redoutent par conséquent :
d'avoir des responsabilités accrues (diversité des sujets et des prérogatives) ;
un risque d'affaiblissement de certains thèmes, s'il faut faire des arbitrages ;
une perte de proximité avec les salariés du fait de la baisse du nombre d'instances, de membres, et d'heures de délégations.
Des pistes pour y remédier sont ici présentées.
Définir des priorités d'intervention et un calendrier
Que ce soit pour les activités sociales et culturelles (ASC) ou pour les aspects économiques, il est important de prioriser et de planifier les actions du CSE, à plus ou moins long terme : répartition des tâches, liste de priorités ...
S'organiser : qui fait quoi ?
Les membres du CSE viennent d'horizons divers.
Certains sont des anciens délégués du personnel, d'autres des anciens membres d'un CHSCT, d'autres encore ont des compétences comptables, administratives ...
Selon ces compétences et les souhaits de chacun, les tâches du CSE peuvent être judicieusement réparties : qui pour les dossiers plus individuels, qui pour les dossiers santé-sécurité, qui pour gérer les ASC ...
Bien utiliser les crédits d'heures
Par rapport à l'ancien système, le nombre d'heures de délégation peut être inférieur, notamment à celui qui était possible en cumulant les mandats.
Il est toutefois plus souple.
En effet, les heures de délégations peuvent maintenant être annualisées : contrairement aux anciens comités d'entreprises, le décompte des heures de délégation ne se fait plus obligatoirement sur un mois : les heures peuvent maintenant être utilisées cumulativement dans la limite de 12 mois, un membre ne pouvant disposer, dans le mois, de plus d'une fois et demi le crédit d'heures de délégation qui lui est accordé (C. trav., art. L. 2315-8 ; C. trav., art. R. 2315-5).
De plus, les heures de délégation peuvent être mutualisées : les membres titulaires peuvent, chaque mois, répartir entre eux et avec les membres suppléants leur crédit d'heures, cette répartition ne pouvant cependant amener l'un d'eux à disposer, dans le mois, de plus d'une fois et demie le crédit d'heures de délégation légal alloué à un membre titulaire (C. trav., art. L. 2315-9 ; C. trav., art. R. 2315-6).
Pour une présentation détaillée des heures de délégation du CSE, voir Les Cahiers Lamy du CSE, no 179, mars 2018 : « Heures de délégation du CSE : la nouvelle donne ».
Rationaliser les réunions
S'il n'y a pas d'accord sur le sujet, le CSE doit être réuni (C. trav., art. L. 2315-28) :
une fois par mois pour les entreprises comptant au moins 300 salariés ;
tous les deux mois dans celles qui comptent moins de 300 salariés.
Il faut aussi savoir que chaque année, au moins 4 de ces réunions doivent porter en tout ou partie sur la santé, la sécurité et les conditions de travail, ou plus fréquemment en cas de besoin, notamment dans les branches d'activité présentant des risques particuliers (C. trav., art. L. 2315-27).
Maintenant que les élus ont plusieurs casquettes, les réunions peuvent être longues, voire très longues, étant donné le nombre de sujets susceptibles d'être abordés.
Peut-être faut-il alors négocier avec l'employeur un autre nombre de réunions annuelles du comité, sachant que ce nombre ne peut être inférieur à 6 (C. trav., art. L. 2312-19).
Cela peut permettre des réunions certes plus fréquentes mais d'une durée plus raisonnable (parfois, mieux vaut 2 réunions de 3 heures qu'une seule réunion de 6 heures) et également de limiter les réunions extraordinaires.
Le lieu des réunions est aussi à bien définir, surtout pour les entreprises présentant une dispersion géographique : il n'est pas forcément judicieux que les élus aient régulièrement des temps de transports excessifs, et des frais conséquents.
Pour la cour de cassation, la fixation du lieu des réunions du comité d'entreprise relève des prérogatives de l'employeur, sauf abus de ce dernier (Cass. soc., 3 avr. 2019, no 17-31.304, Les Cahiers Lamy du CSE no 193, juin 2019). Mais rien n'interdit de s'accorder sur ce point : faire varier les lieux de réunions sur les différents lieux de travail, avoir de temps en temps recours à la visioconférence...
Optimiser ses budgets
Normalement, les deux budgets (le budget de fonctionnement et le budget activités sociales et culturelles) dont dispose le CSE sont totalement indépendants.
Cependant, le CSE est autorisé à transférer tout ou partie du montant de l'excédent annuel du budget de fonctionnement vers son budget des activités sociales et culturelles dans la limite de 10 % de cet excédent (C. trav., art. L. 2315-61 ; C. trav., art. R. 2315-31-1). L'inverse (le transfert d'un excédent du budget ASC au budget de fonctionnement) est aussi possible (C. trav., art. L. 2312-84 ; C. trav., art. R. 2312-51).
Toutefois, attention à protéger le budget de fonctionnement, lequel est utile pour se former et se faire assister. Il convient d'ailleurs de rappeler qu'un CSE qui pratiquerait ce transfert pourrait se voir refuser le financement par l'employeur des 20 % normalement à la charge du CSE en cas de recours à un expert dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques ou d'un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail par exemple, quand bien même le CSE n'aurait pas les moyens de financer cette charge (C. trav., art. L. 2315-80 ; C. trav., art. L. 2315-61).
Les négociations possibles
Afin d'organiser au mieux l'activité du CSE, il est possible de négocier avec les syndicats représentatifs (par un accord majoritaire), ou, en l'absence de délégué syndical, avec le CSE, les points suivants.
Source : Groupe Legrand.
Sur le fonctionnement
la présence des suppléants en réunion ;
l'octroi de crédits d'heures supplémentaires (secrétaire, trésorier, suppléants...) ;
le nombre de réunions annuelles et la périodicité des réunions (cf. ci-dessus) ;
le délai de communication de l'ordre du jour ;
le délai et les modalités d'établissement du P.V. ;
la dotation du budget des activités sociales et culturelles.
Sur les consultations récurrentes : orientations stratégiques, politique sociale, situation économique et financière (C. trav., art. L. 2312-19)
le contenu ;
la périodicité (qui ne peut pas être supérieure à 3 ans) ;
les modalités et délais de consultation ;
la liste des informations nécessaires à ces consultations ;
la possibilité de rendre un avis unique portant sur tout ou partie des thèmes de consultations périodiques.
Sur les consultations ponctuelles (C. trav., art. L. 2312-55)
les délais de consultation ;
le contenu des consultations ponctuelles ;
les modalités des consultations ponctuelles, notamment le nombre de réunions.
Sur la base de données économiques et sociales - la BDES - (C. trav., art. L. 2312-21)
l'organisation, l'architecture et le contenu de la BDES ;
les modalités de fonctionnement de la BDES, notamment les droits d'accès ;
le support de la BDES ;
les modalités de consultation et d'utilisation ;
l'intégration des informations nécessaires aux négociations obligatoires et aux consultations ponctuelles.
Sur les commissions facultatives (C. trav., art. L. 2315-45)
les modalités de mise en place des commissions ;
le nombre de membres ;
leurs modalités de fonctionnement, notamment le nombre d'heures de délégation dont bénéficient les membres de la commission pour l'exercice de leurs missions, et les moyens alloués.
Pour les entreprises divisées en établissements distincts
les niveaux auxquels les consultations sont conduites et leur articulation ;
l'ordre et les délais dans lesquels le CSE central et les CSE d'établissement rendent et transmettent leurs avis ;
le niveau de mise en place de la BDES ;
les compétences respectives du CSE central et des CSE d'établissements pour les ASC (sans accord les ASC sont gérées par les établissements ; en cas d'accord ce transfert fait l'objet d'une convention entre les CSE d'établissements et le CSE central (C. trav., art. L. 2327-16).
Voir :
Les Cahiers Lamy du CE, no 183, juill. 2018 : « Négociation avec le CSE, mode d'emploi ».
Utiliser le règlement intérieur du CSE
Le règlement intérieur du CSE permet de traiter de cas spécifiques au CSE qu'il régit.
Peuvent par exemple être insérées des clauses relatives aux modalités de fonctionnement des commissions, aux frais des élus, à l'utilisation de plusieurs locaux ...
Attention cependant à obtenir l'accord de l'employeur lorsque cela est requis notamment s'il s'agit de mettre à sa charge une obligation ne résultant pas de dispositions légales (C. trav., art. L. 2315-24, al. 2).
Voir :
Les Cahiers Lamy du CE, no 184, sept. 2018 : « Le règlement intérieur : une obligation pour le CSE dans les seules entreprises d'au moins 50 salariés ».
Monter en compétence et se faire accompagner
Les élus du CSE disposent de droits à formation, nécessaires pour mener à bien leurs missions et s'améliorer.
Le congé de formation économique
Les élus titulaires des entreprises d'au moins 50 salariés bénéficient d'un congé de formation économique d'une durée maximale de 5 jours, financée par le budget de fonctionnement du CSE et s'imputant sur la durée du congé de formation économique, sociale et syndicale décrit ci-dessous (C. trav., art. L. 2315-63).
Cette formation est renouvelée lorsque les membres du CSE ont exercé leur mandat pendant 4 ans, consécutifs ou non (C. trav., art. L. 2315-17).
À noter que ces dispositions minimales peuvent être portées à un niveau plus favorable par accord.
Le congé de formation économique et sociale et de formation syndicale
Il est ouvert à tous les salariés et donc aux membres du CSE (qu'ils soient dans une entreprise de plus de 50 salariés ou de moins de 50 salariés) et est d'une durée de 12 jours au plus. Ce congé est de droit, sauf dans le cas où l'employeur estime, après avis conforme du CSE, que cette absence pourrait avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l'entreprise : en cas de différend, le refus de l'employeur peut être contesté devant le conseil de prud'hommes.
Le salarié en congé a droit au maintien total par l'employeur de sa rémunération, mais le code du travail ne prévoit pas de dispositions sur la prise en charge des frais de formation. La question peut se régler par accord : prise en charge par l'employeur, par le CSE, par une organisation syndicale ... (C. trav., art. L. 2145-5 et s.).
Le congé de formation en santé, sécurité et conditions de travail
Tous les membres du CSE (titulaires comme suppléants, membres ou non de l'éventuelle commission santé sécurité et conditions de travail) bénéficient d'une formation en santé sécurité et conditions de travail financée par l'employeur, d'une durée minimale de 5 jours dans les entreprises d'au moins 300 salariés et de 3 jours dans les entreprises de moins de 300 salariés (C. trav., art. L. 2315-18 ; C. trav., art. L. 2315-40 ; ministère du Travail, « Comité social et économique : 100 Questions/réponses » avr. 2018, question no 72).
Bénéficier de l'appui d'experts
Le CSE, dans le cadre des trois grandes consultations annuelles, peut se faire assister par un expert-comptable dont les honoraires sont pris en charge par l'employeur (à l'exception des orientations stratégiques pour lesquelles le CSE doit financer 20 %). Pour toutes les autres consultations, il peut également recourir à un expert qui sera alors financé par son budget de fonctionnement.
Le CSE a en outre la possibilité de faire appel à tout type d'expertise rémunérée par ses soins pour la préparation de ses travaux, afin de bénéficier de l'appui de spécialistes (C. trav., art. L. 2315-81).
Il peut aussi s'agir d'experts habilités en cas de risque grave ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (C. trav., art. L. 2315-94).
Source : Groupe Legrand.
Prendre en compte les enjeux santé/ sécurité/conditions de travail
Les anciens CHSCT doivent se fondre dans le CSE, qui en récupère donc les attributions.
Les entreprises d'au moins 300 salariés et celles qui présentent des risques importants telles les entreprises comprenant une installation nucléaire ou une installation Seveso (voir C. trav., art. L. 2315-36) doivent mettre en place une commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) au sein du CSE ; l'inspecteur du travail peut aussi en imposer une (C. trav., art. L. 2315-36 et s.).
Le CSE délègue à cette commission tout ou partie de ses attributions relatives à la sécurité, à la santé et aux conditions de travail (hormis les consultations, car la commission n'a pas de pouvoir de décision, et le recours à des experts).
Cette délégation se fait par accord d'entreprise, ou, en l'absence de délégué syndical, par un accord entre l'employeur et le CSE adopté à la majorité des membres titulaires (C. trav., art. L. 2315-41 et s.). À défaut, le règlement intérieur du CSE peut aussi comporter des prescriptions en ce domaine.
Mais les autres entreprises ne sont bien entendu pas dispensées de prendre en compte les enjeux santé/sécurité, résumées dans le schéma ci-après.
DUERP : document unique d'évaluation des risques professionnels.
Il est important pour le CSE de réfléchir à la répartition des rôles en ce domaine, entre membres du CSE, et entre le CSE et les éventuelles CSSCT : qui prépare les réunions, qui recherche les informations nécessaires (et assure une veille sur la règlementation santé/sécurité/conditions de travail), qui mène les enquêtes et les inspections ...
En résumé ...
Source : Groupe Legrand.
Auteur : Delphine Julien-Paturle, Juriste en droit social