Le nouveau protocole sanitaire
pour les entreprises, publié jeudi soir, leur permet de réaliser des tests
rapides sur leurs salariés. Mais ce dépistage ne pourra pas être systématique
et l'employeur n'aura pas accès aux résultats.
Par Solveig Godeluck, Leïla de Comarmond
Les échos. fr
Publié le 30 oct. 2020
à 17:04Mis à jour le 30 oct. 2020 à 17:05
Certaines le réclamaient depuis des mois. Mais jusque-là, le protocole
sanitaire pour les entreprises était catégorique : il n'est pas possible
pour elles d'organiser des campagnes de dépistage du Covid-19. Changement de
pied du gouvernement avec la nouvelle version de celui-ci mise en ligne jeudi
soir. « Au-delà des campagnes de dépistage organisées par les
autorités sanitaires et auxquelles les entreprises peuvent participer, les
employeurs peuvent, dans le respect des conditions réglementaires, proposer à
ceux de leurs salariés qui sont volontaires, des actions de dépistage »,
expose le texte.
Tests « antigéniques »
Le dépistage est
facilité par les tests rapides que plusieurs arrêtés récents autorisent pour
dépister le coronavirus, à l'échelle individuelle ou bien de façon
massive ; des tests pris en charge par l'Assurance-maladie s'ils sont réalisés en pharmacie, chez le médecin ou
l'infirmier . Pour l'instant ces tests
« antigéniques », qui n'ont pas besoin d'être analysés en
laboratoire, sont prélevés dans le nez. A la fin de l'année, des tests
salivaires moins intrusifs devraient arriver sur le marché.
Le protocole national
précise que s'il est à son initiative, un dépistage devra être « intégralement
financé par l'employeur ». Pas question de demander une
quote-part au salarié ou un remboursement par l'Assurance-maladie. L'entreprise
devra aussi veiller à la « bonne exécution » du test
qui ne saurait être obligatoire et respecter le secret médical. « En
particulier, aucun résultat ne peut être communiqué à l'employeur ou à ses
préposés », est-il spécifié. Les tests sérologiques quant à eux ne
sont pas autorisés. Ils ne permettent pas de dépister une personne infectée,
mais uniquement de savoir si elle a été infectée à un moment dans l'année.
« Appel d'air »
Avant le
reconfinement, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, espérait qu'en libéralisant le
recours aux tests antigéniques , les entreprises pourraient
rester ouvertes, notamment dans l'événementiel ou la culture, en filtrant les
entrées de spectateurs. Son espoir a été déçu. Toutefois, les secteurs qui
vont rester ouverts auront désormais les moyens d'assurer la sécurité de leurs
salariés, estime Vincent Dailloux, co-fondateur de Medisur, une société
française qui est prête à organiser des campagnes de tests rapides pour le
compte des entreprises : « Sur les chantiers du BTP, c'est
compliqué de maintenir à 100 % la distanciation physique. Ces tests vont
être un appel d'air pour nos clients, qui attendaient le « go » avant
de se lancer », témoigne-t-il.
Autre type
d'entreprise qui pourrait bondir sur l'occasion, la grande
distribution : « Cela pourrait rassurer les salariés au
contact avec les clients et permettre de vérifier qu'il n'existe pas de chaîne
de contamination », plaide-t-il. Combien de tests les entreprises
pourraient-elles ainsi réaliser ? « Ce marché peut facilement
monter à 500.000 tests par semaine », extrapole Vincent Dailloux, en
considérant que les professions de santé de ville pourraient, elles, atteindre
1,5 million de dépistages hebdomadaires.
Précautions
Pour lui, l'idéal
serait de dépister le personnel une fois par semaine, sachant que la fiabilité
des tests demeure « importante » jusqu'à cinq jours
après une contamination et qu'ils devront toujours être réalisés par un
professionnel de santé, sous la responsabilité d'un médecin, afin de garantir
la « bonne exécution ».
Les entreprises
devront cependant s'entourer de précautions si elles veulent se lancer. La
valeur limitée du protocole sanitaire concernant les entreprises, qui n'est
même pas un texte réglementaire, impose la « prudence »,
avertit Virgile Pradel, un avocat spécialisé sur les questions de santé au
travail « Il y a un risque juridique important pour l'employeur »,
prévient-il, en pointant notamment les enjeux liés au RGPD. « Il
faut absolument associer à l'initiative la médecine du travail - on ne bouge
pas tant qu'elle n'a pas validé l'action - ainsi que les représentants du
personnel dans le cadre du Conseil social et économique »,
insiste-t-il.
Nos remarques:
Cette pratique est extrêmement limitée et soumis à négociation avec les instances du personnel.
La CFTC sera vigilante aux risques de dérapages d'une Direction pouvant être toujours enclin à des tentatives de zèle, visant plus la protection de l'entreprise que celle des salariés