L'unité économique et sociale (« l'UES ») est un périmètre d'origine jurisprudentielle d'implantation des instances de représentation du personnel. Imaginée et mis en œuvre à l'époque, désormais révolue, des comités d'entreprise, des délégués du personnel et des CHSCT, l'UES va-t-elle survivre à la mise en œuvre du nouveau comité social et économique (« CSE ») d'ici le 31 décembre 2019 ?
26/04/2019 Les Cahiers Lamy du CSE, Nº 192
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L'UES « gomme » les frontières juridiques des sociétés présentant des liens de collaboration plus ou moins étroits (capitalistiques, partage de main-d'œuvre, unité de direction...) en matière d'élections professionnelles. Lorsqu'elle est reconnue (dans un contexte judiciaire ou par accord collectif), le périmètre de mise en œuvre de la représentation du personnel n'est plus limité à l'entreprise mais s'étend à l'ensemble des sociétés qui composent cette UES comme si celle-ci n'était qu'une seule et même entreprise. L'UES autorise ainsi un ensemble de sociétés à construire une cartographie de la représentation du personnel dans laquelle, par exemple, un comité central (CCE d'UES) et plusieurs comités d'établissement (CE d'UES) seront informés et consultés sur leurs périmètres indépendamment de la question des contours juridiques des sociétés qui composent l'UES.
Conçu historiquement pour contrecarrer la multiplication des entités juridiques effectuée dans le (seul) but de contrer la mise en place d'institutions représentatives du personnel, l'UES a, depuis, évolué au point de sortir de cette (seule) logique défensive. L'UES, dont les contours sont de plus en plus négociés et donc de moins en moins dépendants de la seule issue judiciaire, revêt des formes parfois très différentes selon les souhaits des parties.
Jusqu'ici, l'UES pouvait représenter un instrument privilégié pour la mise en place des instances de représentation du personnel au sein d'organisations d'entreprises aux structures et dimensions complexes :
côté Direction, l'UES peut être un outil de rationalisation des instances de représentation du personnel. Elle permet par exemple de créer un dialogue social entre des sociétés tenues par les obligations en matière de représentation du personnel mais dépourvues de tout candidat. Elle permet encore de rapprocher, au sein d'une même instance, des sociétés juridiquement distinctes (en raison par exemple d'une politique d'acquisition sans intégration) dont les activités présentent des caractéristiques très proches. L'UES peut enfin justifier une organisation nouvelle des informations-consultations obligatoires, à un niveau plus approprié. Il faut toutefois relever que la reconnaissance d'une UES entraîne de droit l'extension automatique des régimes de participation aux sociétés composant l'UES peu important que celles-ci disposent de moins de 50 salariés (seuil légal) ;
côté organisations syndicales, l'UES peut constituer une alternative plus forte qu'un comité de groupe, notamment en raison des informations-consultations obligatoires devant un CCE et/ou un CE mais inexistantes devant un comité de groupe. L'UES a également accès à des informations sur le fonctionnement de sociétés pour lesquelles, par ailleurs, elle ne dispose d'aucune information en raison de l'absence d'élus ou de section syndicale. L'UES peut enfin faciliter le rôle de certains élus, qui concentrent plus de prérogatives mais aussi parfois plus de moyens.
L'instauration du comité social et économique (CSE) et les multiples nouveautés issues de l'ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 (1) interrogent sur l'intérêt aujourd'hui du concept même d'UES. À paramètre constant au sein de l'UES, c'est-à-dire en reprenant la même configuration que celle qui préexistait à la mise en place du CSE, la disparition des délégués du personnel, du CHSCT et du comité d'entreprise et la reprise de leurs attributions au sein du seul CSE ne sont-elles pas de nature à rendre moins pertinent le recours à l'UES ? autrement dit, et si le CSE, de par sa construction en elle-même, sonnait la fin de l'UES ?
côté organisations syndicales, l'UES peut constituer une alternative plus forte qu'un comité de groupe, notamment en raison des informations-consultations obligatoires devant un CCE et/ou un CE mais inexistantes devant un comité de groupe. L'UES a également accès à des informations sur le fonctionnement de sociétés pour lesquelles, par ailleurs, elle ne dispose d'aucune information en raison de l'absence d'élus ou de section syndicale. L'UES peut enfin faciliter le rôle de certains élus, qui concentrent plus de prérogatives mais aussi parfois plus de moyens.
L'instauration du comité social et économique (CSE) et les multiples nouveautés issues de l'ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 (1) interrogent sur l'intérêt aujourd'hui du concept même d'UES. À paramètre constant au sein de l'UES, c'est-à-dire en reprenant la même configuration que celle qui préexistait à la mise en place du CSE, la disparition des délégués du personnel, du CHSCT et du comité d'entreprise et la reprise de leurs attributions au sein du seul CSE ne sont-elles pas de nature à rendre moins pertinent le recours à l'UES ? autrement dit, et si le CSE, de par sa construction en elle-même, sonnait la fin de l'UES ?
L'examen de la configuration du CSE au sein d'une UES puis de son fonctionnement permet d'apporter dès à présent des éléments de réponses à cette question.
La configuration du CSE au sein d'une UES
Quel découpage des établissements au sein d'une UES ?
Par principe, le comité économique et social est mis en place « au niveau de l'entreprise ». En présence d'établissements distincts, des comités sociaux et économiques d'établissement et un comité social et économique central d'entreprise sont constitués (C. trav., art. L. 2313-1). Suivant la même logique, lorsqu'une UES est reconnue par accord collectif ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, un comité social et économique commun est mis en place. Si l'UES reconnue comporte des établissements distincts, ce sont des comités sociaux et économiques d'établissement et un comité social et économique central d'entreprise qui sont mis en place. Dans les deux situations, c'est un accord d'entreprise conclu soit au niveau de l'entreprise, soit au niveau de l'unité économique et sociale qui doit déterminer le nombre et le périmètre des établissements distincts.
Fort de ce constat et sous réserve d'obtenir l'accord des organisations syndicales représentatives majoritaires dans un périmètre correspondant, l'intérêt de recourir à l'UES est de reconnaître simultanément dans ce même accord le périmètre de ses établissements distincts puisque les conditions d'adoption de ces deux accords sont identiques. Mieux, le législateur ne pose réellement aucune limite au découpage des périmètres sociaux par accord. C'est par conséquent la configuration même de l'UES, la place de ses instances au sein d'un regroupement complexe de sociétés qui peuvent être adaptées selon les souhaits de ses acteurs. De façon négociée, un éclatement « social » de sociétés juridiquement distinctes est envisageable. Dans ce cadre, la société X, dont l'activité économique est similaire à celle exercée en partie par une société Y pourrait, par exemple, disposer d'une instance de représentation commune avec cette seconde société, l'instance de représentation se limitant à cette activité commune. Autre exemple, dans une même UES, trois sociétés pourraient intégrer le périmètre d'une seule instance alors qu'en parallèle une autre société membre d'une UES pourrait être dotée de plusieurs établissements distincts, le tout sous la supervision d'une même instance centrale.
Néanmoins, la nouvelle déconnexion entre les accords de cartographie sociale et les opérations électorales (2) amène à envisager différemment les organisations sociales jusqu'ici mises en œuvre. La configuration - maîtrisée - de l'UES est soumise à la négociation. Elle a donc également, pour ces mêmes raisons, ses possibles limites. Lorsque le recours à UES est reconnu dans le cadre d'un accord autonome et suite à l'échec des négociations sur la cartographie sociale, c'est l'un des employeurs membres de l'UES, mandaté par les autres membres de l'UES, qui fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts, compte tenu de l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement, notamment en matière de gestion du personnel (C. trav., art. L. 2313-8). Or un contrôle des périmètres par la DiRECCTE sur saisine des organisations syndicales représentatives, reste possible. L'intérêt opérationnel des établissements définis par l'employeur mandaté peut ne pas être pris en compte par la DiRECCTE dans la mesure où les tribunaux restent liés par le critère de « l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement ».
En ce sens, c'est la proximité des instances avec la communauté des salariés qui peut être fragilisée. La référence à l'autonomie de gestion pour la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts, lieu d'implantation des CSE, pourrait ainsi conduire les directions à fixer une représentation du personnel, sans réel maillage des différents sites de la société. Ni les DiRECCTE, ni les tribunaux n'ont de surcroît de prérogatives pour définir un niveau autre de représentation du personnel.
Le retour à la mise en place de la représentation du personnel (dans le cadre de la première mise en œuvre du CSE) au niveau de l'entreprise pourrait apparaître comme un choix plus cohérent que celui de l'UES lorsque le seul effet recherché est de continuer à avoir une représentation du personnel présente au niveau global et en proximité.
Quelle implantation des commissions santé sécurité et conditions de travail ?
Les commissions santé sécurité et conditions de travail dépendent directement du CSE. Malgré leur absence d'autonomie, elles ont vocation à préparer les réunions et les délibérations de leur comité de rattachement sur les questions de santé, de sécurité et de conditions de travail. À ce titre, elles peuvent se voir confier, par délégation de ce même comité, tout ou partie de ses attributions relatives à la santé, la sécurité et les conditions de travail (C. trav., art. L. 2315-38).
Si les ordonnances Macron ont maintenu le seuil de 50 salariés pour la mise en place du CSE, elles ont fixé à 300 salariés le curseur de principe pour mettre en place une commission santé sécurité et conditions (CSSCT) au sein de l'entreprise ou d'un établissement, sauf décision de l'inspection du travail contraire ou sites de travail avec des risques majeurs (site SEVESO, nucléaire). Ces différents curseurs sont parfois inadaptés à la réalité opérationnelle d'un groupe de sociétés. Ils peuvent exclure la création d'une telle commission, alors même qu'elle pourrait être judicieuse, entraînant la fin du maillage local existant avec les anciens CHSCT. À l'inverse, des commissions vont être créés alors même que leur rôle sur le périmètre choisi peut être discutable.
Face à cette inadéquation, des ajustements particuliers peuvent être apportés en présence d'une UES. Par exemple, lorsqu'une UES est composée en tout ou partie de sociétés dont les effectifs ne permettent pas la mise en place d'une telle commission, l'accord de configuration de l'UES peut, à titre alternatif, et lorsque le sujet santé et sécurité est majeur au sein de sociétés (bâtiment, industrie par exemple), prévoir l'instauration d'une ou plusieurs commissions santé et sécurité. À l'opposé et compte tenu de la complexité et de l'expertise nécessaire au bon traitement des sujets santé et sécurité au sein d'une société, la mise en place d'une seule commission santé sécurité susceptible d'intervenir auprès de plusieurs sociétés peut être efficiente.
Cependant, ce qui pouvait avoir du sens avec le CE et le CHSCT l'est moins avec le CSE. Par accord, la mise en place d'une CSSCT au sein d'une société dont l'effectif est inférieur à 300 salariés est possible. La recherche d'une proximité et d'un maillage des différents sites d'une société dans la représentation du personnel peut prendre la forme d'une telle organisation, à même de répondre à la suppression de l'échelon de proximité de la représentation du personnel. Par accord, il est également possible de définir au sein d'une même société, une CSSCT qui interviendrait sur plusieurs périmètres d'établissements distincts. Enfin, l'instauration par le législateur d'une CSSCT centrale, c'est-à-dire rattachée au CSE central et dont le fonctionnement est encore méconnu, pourrait relativiser fortement l'intérêt d'une UES. Les nouvelles marges de manœuvres des partenaires sociaux dans le rôle et l'implantation des CSSCT peuvent ainsi favoriser l'attrait de l'entreprise et non celle de l'UES, lorsque l'objectif recherché est de poursuivre la présence d'une représentation du personnel au niveau central mais également auprès de tous les sites de travail.
Quelle composition pour les instances ?
La fixation du nombre d'élus, titulaires ou suppléants, relève du protocole d'accord préélectoral et de sa condition d'adoption à la double majorité. En pratique et dans le cadre des négociations, les organisations syndicales représentatives tendent fréquemment à solliciter des « postes » supplémentaires pour compenser les effets mécaniques de la fusion des instances.
L'ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 et son décret d'application no 2017-1819 du 29 décembre 2017 ont instauré en parallèle la possibilité de modifier à la hausse comme à la baisse le nombre d'élus dans le cadre du protocole d'accord préélectoral, dès lors qu'est garanti un volume global d'heures de délégation au moins égal aux dispositions légales relatives à l'effectif de l'entreprise.
Cette nouvelle option est-elle pertinente dans le cadre d'une UES ?
Assorti à la possibilité de négocier le protocole d'accord préélectoral au niveau du centre de décision retenu de l'UES (c'est-à-dire à un niveau unique et non établissement par établissement) le recours à l'UES pourrait être privilégié pour adapter le nombre d'élus au besoin réel des instances, qui peut être différent selon leur périmètre d'implantation. Par exemple, un nombre d'élus inférieur pourrait être prévu sur un périmètre d'établissements aux enjeux réduits ou pour lesquels des carences de candidatures sont à prévoir. Par « compensation », un nombre d'élus supérieurs sur un périmètre dont les enjeux sont jugés plus sensibles pourrait être convenu. Le sujet du rôle et des prérogatives des suppléants, très réduits dans le cadre du CSE, peut également être abordé sous un autre angle en pareille situation. Par accord, il pourrait ainsi être prévu plus ou moins de suppléants selon les périmètres et leurs enjeux. L'objectif ici recherché étant de rendre le suppléant « efficace » en lui permettant, par exemple, de participer à l'animation et au fonctionnement de commissions.
Néanmoins et si l'objectif de l'UES était également d'adapter le nombre de représentants du personnel présents au sein du groupe de sociétés, l'intérêt de poursuivre cet objectif par cette voie est lui aussi réduit. En effet, la mise en place du CSE entraîne, par simple application de la loi, une rationalisation du nombre global de représentants du personnel. De par cet effet, il devrait y avoir moins de postes vacants à l'issue des élections, notamment pour les entreprises dont l'effectif est situé entre 50 et 300 salariés. De même, le nombre trop important d'élus présents aux comités d'entreprise, souvent critiqué par les Directions, est aussi atténué, notamment parce que les élus suppléants n'ont plus à assister (sauf cas de vacances) aux réunions du CSE. Si l'objectif de l'UES était de rationaliser le nombre de représentants du personnel, l'ordonnance du 22 septembre 2017 a déjà produit cet effet.
Le fonctionnement du CSE au sein d'une UES
L'ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 fusionne le comité d'entreprise, les délégués du personnel et le CHSCT au sein d'une seule et même instance : le CSE (qui en reprend l'ensemble des attributions). La même ordonnance instaure de nombreux ajustements sur le fonctionnement du CSE qu'il convient d'analyser au prisme de l'UES. Il en est notamment ainsi du nombre de réunions plénières ordinaires dans les établissements de moins de 300 salariés, du niveau de déroulement des consultations dites périodiques et des moyens de l'instance pour la gestion de toutes ses attributions. Ces changements rendent-ils pertinents le recours à l'UES ?
Le déroulement des réunions ordinaires du CSE
À défaut d'accord, le comité social et économique est réuni, sur convocation de l'employeur ou de son représentant, au moins une fois par mois dans les entreprises d'au moins 300 salariés et au moins une fois tous les deux mois dans les entreprises de moins de 300 salariés. Dans le cadre d'un accord collectif, cette fréquence peut s'accroître ou s'abaisser, dans la limite de six réunions par an.
À l'instar de ce qui peut conduire les accords de configuration des UES à retenir des périmètres inter-entreprises, neutralisant leur organisation juridique, certains périmètres de CSE peuvent avoir pour objectif de limiter le nombre de leurs réunions ordinaires, même lorsque l'effectif salarié relevant de ce périmètre est important. Le nombre de réunions nécessaires n'est ainsi pas uniquement dépendant de l'effectif salarié concerné. Il intègre désormais la complexité des questions rencontrées sur le périmètre considéré.
À l'inverse, la reprise par le CSE des prérogatives des délégués du personnel, du comité d'entreprise et du CHSCT inquiète l'ensemble des partenaires sociaux dès lors que se posent les questions de la fixation des ordres du jour, souvent à rallonge, ou du déroulement pratique de la réunion. Ajouter à cette nouvelle difficulté un champ de compétence du CSE supra-société pourrait renforcer ces inquiétudes. L'intérêt de l'UES pour fluidifier le déroulement des réunions ordinaires peut alors sembler pour le moins relatif.
Le déroulement des consultations périodiques
L'un des changements marquants de l'ordonnance du 22 septembre 2017 précitée réside dans la clarification du niveau d'exercice des consultations périodiques en présence d'établissements distincts. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 2312-22 du Code du travail, et à défaut d'accord collectif contraire ou autre volonté de la Direction de l'entreprise, les consultations sur les orientations stratégiques de l'entreprise et la situation économique sont par principe conduites au niveau de l'entreprise. La consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et de l'emploi est quant à elle conduite à la fois au niveau central et au niveau des établissements lorsque sont prévues des « mesures d'adaptation spécifiques à ces établissements ». L'intérêt d'une telle clarification est de limiter efficacement les doublons de consultation lorsque l'objet de celle-ci est identique et lorsque les documents transmis à l'instance centrale présentent déjà des détails par activités ou établissements.
Face à cette évolution, quid pour l'UES ? Pour les questions de niveau de consultation, le législateur n'est jamais réellement intervenu sur le sujet, malgré l'absence de personnalité juridique de l'UES. Néanmoins, et en pratique, les consultations périodiques se déroulaient avant tout auprès de l'instance centrale. La neutralisation du déroulement des consultations périodiques au niveau de l'établissement était d'ailleurs, par le jeu des accords collectifs, l'un des objectifs recherchés par les configurateurs des UES.
Avec l'instauration du CSE, la question du niveau d'organisation des consultations périodiques en présence d'établissements distincts au sein d'une entreprise ne se pose plus. L'intérêt de recourir à l'UES pour neutraliser la « double » consultation a donc disparu.
Concernant plus spécifiquement la consultation périodique relative à la politique sociale, celle-ci devra dorénavant se dérouler simultanément au niveau central et au niveau de l'établissement s'il est établi que sont prévues, dans ce dernier, des « mesures d'adaptation spécifiques ». Se posera nécessairement pour les praticiens la question de l'existence ou non de « mesures d'adaptation spécifiques ». Dans le cadre d'une entreprise au fonctionnement uniforme (recrutement, statut collectif, plan de formation...), l'existence de mesures d'adaptation spécifiques sera contestable. Dans le cadre d'une UES, la contestation sera plus incertaine en présence de sociétés juridiquement distinctes, pour lesquelles des disparités en termes de politique d'emploi existent fréquemment.
La gestion du budget des ASC
La gestion des activités sociales et culturelles est un sujet qui intéresse avant tout les membres du comité social et économique au bénéfice des salariés. Néanmoins, c'est bien par accord entre la direction et les organisations syndicales représentatives que se définit le montant de la dotation patronale au financement de ces activités (C. trav., art. L. 2312-81). L'une des difficultés au sein d'un groupe de sociétés, notamment après une réorganisation ou l'acquisition de nouvelles entités, est de parvenir à un montant homogène entre sociétés et entre établissements, pour ne pas pénaliser certains collaborateurs, tout en conservant un budget maîtrisé.
L'UES peut aujourd'hui constituer un cadre de fixation privilégié du montant de la contribution patronale dès lors que l'accord signé à ce niveau s'imposerait aux éventuels accords d'entreprise qui préexisteraient à l'entrée d'une société au sein de l'UES. La disparition automatique des accords d'entreprise ou d'établissements relatifs au fonctionnement du comité d'entreprise avec la mise en place du CSE facilite une telle remise à plat.
Pour les élus concernés, c'est aussi indirectement l'opportunité de faciliter la présentation de leurs offres de service à l'ensemble des salariés couverts par le périmètre de l'UES puisque, de fait, les montants sont identiques entre toutes les sociétés composant l'UES. Si la gestion pourra demeurer autonome par établissement, et sauf recherche d'une mutualisation totale par accord entre les membres élus de chaque établissement, l'affichage d'une homogénéisation peut renforcer l'appartenance des salariés à l'entreprise.
Enfin, le nouveau mécanisme de fongibilité entre le budget des activités sociales et culturelles et le budget de fonctionnement, dans la limite annuelle de 10 % de ces budgets, pourrait aussi voir son intérêt décuplé à l'échelle d'une UES. En effet, le transfert simultané des excédents annuels des différents budgets de fonctionnement ou des activités sociales et culturelles pourrait constituer une enveloppe financière importante pour couvrir certains besoins inattendus.
En ce sens, recourir à une UES peut être judicieux pour les membres élus de la délégation du personnel.
Le financement des expertises par le CSE
L'ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 a modifié les règles applicables en matière de financement des expertises sollicitées par le CSE, notamment dans le cadre de la procédure de consultation. 20 % du coût des expertises sollicitées dans le cadre de la consultation du CSE survenant en raison d'une opération de concentration, d'une OPA ou au titre des orientations stratégiques est dorénavant à la charge du CSE à l'initiative de cet appui extérieur (C. trav., art., L. 2315-80). C'est en principe sur les budgets de fonctionnement du CSE que ce financement complémentaire s'opérera.
Compte tenu des enjeux et du coût important de telles expertises, les membres élus du CSE seront pour le moins vigilants dans leur décision de recourir à une telle expertise. L'instance centrale de l'UES, qui est généralement le niveau le plus pertinent, voire de droit à défaut d'accord, pour le déroulement des consultations précitées, peut constituer le périmètre idoine pour faire ainsi face à de possibles difficultés de financement.
Néanmoins et à l'instar de l'ex-comité central d'entreprise, le CSE central ne dispose pas, par principe, de ressources en propres, sauf stipulations conventionnelles de branche contraires. C'est donc par accord entre le CSE central et les CSE d'établissement et sans passer par les organisations syndicales représentatives que le montant des ressources financières du CSE central doit être déterminé. Des échanges entre membres des instances seront alors nécessaires, une fois le CSE central mis en place, pour envisager une mutualisation des moyens, ce qui n'est pas évident... La société ou le groupe de sociétés concernées ne seront eux nullement tenus d'octroyer une contribution spécifique au financement de celui-ci. De surcroît, les consultations visées par la limitation du financement ne relèvent pas nécessairement du CSE central de l'UES. Une opération de concentration ou une OPA cible un groupe ou une entreprise et pas nécessairement son périmètre social dans le cadre d'une UES. Comme évoqué précédemment, le niveau de consultation des orientations stratégiques n'est pas défini. L'UES présente donc peu d'avantage sur une telle problématique.
Au final, tant les nouvelles règles de définition des établissements distincts que celles ayant trait au fonctionnement du CSE semble nuancer l'intérêt du recours à l'UES. Cette appréciation sera-t-elle partagée par les praticiens ? Les mois qui vont suivre la première mise en place des CSE nous apporteront probablement la réponse.
Notes
(1) Ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales.
Notes
(1) Ordonnance no 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales.
(2) « Elections du CSE : la nécessaire déconnexion des négociations sur les établissements distincts et des opérations électorales ». Cahiers Lamy du CSE no 186 de novembre 2018.
David Fonteneau, Avocat associé, Cabinet Ellipse Avocats
Guillaume Dedieu, Avocat, Cabinet Ellipse Avocats
Guillaume Dedieu, Avocat, Cabinet Ellipse Avocats
Notre avis:
Dans le cadre de la création du CSE et du PAP de BPCE Sa, nous aurons à traiter tous les aspects et impacts de cette nouvelle organisation liée aux lois Macron.
début des négos prévues ( mai 2019 pour des élections novembre 2019)
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