Procès Ikea : un an de prison ferme requis contre
un ex-PDG, deux millions d'euros d'amende contre la société
COMPTE
RENDU D'AUDIENCE - La procureure a aussi réclamé des peines de prison ferme à l'encontre
d'un ex-cadre supérieur de l'entreprise et d'un ancien enquêteur privé.
Par Aude
Bariéty « le FIGARO »
Publié il
y a 1 heure, mis à jour il y a 54 minutes
Ikea
a-t-elle «fliqué» des salariés, candidats à l'embauche et clients pendant plusieurs années,
de manière «massive»? Pour la procureure Paméla Tabardel, la réponse est oui. «Il y a
une gravité des faits certaine qui transparaît», a-t-elle insisté lors de son réquisitoire ce mardi 30 mars, au sixième
jour du procès Ikea. Une audience à fort «enjeu», malgré des «imperfections» dans le dossier que la parquetière reconnaît et que les avocats du
dossier, tant côté défense que côté partie civile, n'ont cessé de dénoncer.
Contre
la société Ikea France, en tant que personne morale, la représentante du
ministère public a réclamé un «message
fort», en l'occurrence une amende de deux
millions d'euros. «Ikea ne reconnaît pas sa responsabilité» alors qu'«elle est à la fois le support de cette
fraude et la bénéficiaire de cette collecte de données en en tirant un avantage
organisationnel», a regretté Paméla Tabardel.
L'entreprise encourt en théorie une amende pouvant aller jusqu'à 3,75 millions
d'euros.
À
l’encontre de trois anciens dirigeants, la magistrate a fait des demandes très
différentes : trois ans de prison dont deux avec sursis pour Jean-Louis
B., directeur général de 1996 à 2009; une relaxe pour Stefan V., directeur
général de 2010 à 2015; deux ans de prison avec sursis et 10.000 euros d'amende
pour Dariusz R., ex-directeur administratif et financier. «On a
longuement évoqué la règle des 'quatre yeux', concernant les signatures de
factures, mais on a plutôt affaire à la règle des 'quatre yeux fermés'
puisqu'on signe, mais les yeux fermés», a
ironisé la procureure.
Salariés espionnés: que reproche
t-on à Ikea France dont le procès s'ouvre à Versailles ?
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ACTIVER
LE SON
«Pas un lanceur d'alerte»
Paméla
Tabardel a par ailleurs réclamé «une
peine ferme» - trois ans de prison dont deux
avec sursis - contre Jean-François P., qui est à ses yeux «l'acteur
central de ce dossier». L'ex-directeur du département de la
gestion du risque est l'un des rares à assumer ses responsabilités. «Effectivement,
on peut louer son effort d'honnêteté et de transparence. Il a pu nous donner
des clés dans ce dossier. Mais il n'est pas un lanceur d'alerte, ce n'est pas
lui qui a fait cesser les faits, ce sont les syndicats et la presse», a souligné la magistrate.
La
magistrate a requis un an de prison avec sursis et 10.000 euros d'amende à
l'encontre de Sylvie W. L'ex-adjointe de Jean-François P. nie avoir été au
courant de recherches illégales, ce que la procureure ne juge pas crédible.
Cette dernière a également demandé au tribunal de prononcer des «peines
d'avertissement», allant de six mois de prison avec
sursis à deux ans de prison avec sursis et 5000 euros d'amende, à l'encontre de
deux anciens directeurs de magasin et de leurs ex-responsables de la sécurité.
Sur le
cas particulier de Claire H., qui fut directrice des ressources humaines d'Ikea
France puis co-directrice du magasin de Franconville, la représentante du
ministère public a sollicité une relaxe à contrecœur. «Claire
H. a fait preuve d'une particulière mauvaise foi. Je suis persuadée qu'elle
était au courant de ces pratiques. Mais il n'y a pas d'éléments matériels la
concernant pendant la période des faits. Les éléments sont, je pense,
insuffisants, même si nous ne sommes pas dupes.»
«Impact sur la vie de plusieurs
personnes»
S'intéressant
aux quatre policiers soupçonnés d'avoir consulté leur fichier informatisé, le
Stic, pour renseigner Ikea, la parquetière a proposé des peines allant de six
mois de prison avec sursis à deux ans de prison avec sursis et 5000 euros
d'amende. Aux yeux de Paméla Tabardel, «le
fonctionnaire le plus impliqué» est
Alain S., ancien commandant de police. «Il n'a
pas contesté les faits - 229 consultations au Stic portant sur 151 personnes -
mais je souligne son absence. Il n'a pas daigné se rendre au tribunal», a-t-elle déploré.
Enfin, à
l'encontre de Jean-Pierre F., ex-enquêteur privé, Paméla Tabardel a
requis «une peine ferme, qui va être considérée
comme sévère» : deux ans de prison dont un an
avec sursis. Le septuagénaire a toujours nié avoir demandé à des policiers de
mener des recherches sur le Stic. «On
s'interroge sur la sincérité de ses déclarations», a cinglé la magistrate. «Il
doit comprendre que ses agissements, qui se sont poursuivis sur de nombreuses
années, ont eu un impact sur la vie de plusieurs personnes.»
L'audience va désormais se poursuivre jusqu'à la fin de la semaine avec les
plaidoiries des avocats de la défense. Les quinze personnes physiques prévenues
ainsi que la représentante de la personne morale Ikea France auront la parole
en dernier, avant que le tribunal correctionnel de Versailles ne mette son
jugement en délibéré à une date encore inconnue.
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