Canicule au bureau: quels sont vos droits en tant que salarié?
Par Marion Perroud le 24.07.2018
à 09h50
Avec
des pics de chaleur dépassant par endroit les 35°C, l’été a bel et bien démarré
en France. Au grand dam de certains salariés qui ne bénéficient pas de systèmes
de climatisation sur leur lieu de travail. Que prévoit la loi pour eux?
A paris le 22 juin
2017 pendant l'épisode de canicule. Photo d'illustration
KONRAD
K./SIPA
Chaque été c'est la
même rengaine: le beau temps revient, le thermomètre grimpe et il devient
impossible de vous concentrer à votre poste de travail. Le fond de l'air est
lourd, chaque geste semble nécessiter un effort surhumain. Et ce n'est pas
l'éventail ni le brumisateur de votre voisin(e) de bureau qui va calmer cette
pénible sensation de moiteur qui ne vous quitte plus. "C'est dur pour tout
le monde, mais c'est comme ça!", rétorque votre patron quand vous
l'interpellez pour la énième fois sur le sujet. Concrètement, que prévoit le
Code du travail en cas de canicule sur le lieu de travail?
Dans les faits, pas
grand chose. "Il existe des dispositions particulières pour les périodes de grand froid mais rien sur un niveau
maximal d'exposition à la chaleur, confirme Sonia Moreau, conseil au sein du
cabinet d'avocats August Debouzy. Depuis un décret de 2008,
l'employeur a néanmoins une obligation de résultat en matière de prévention et
de plan d'actions, qui inclut la prise en compte des risques liés aux
"ambiances thermiques", donc des périodes de canicule, dans le cadre
du document unique [document qui recense l'ensemble des risques auxquels sont
exposés les salariés, ndlr]." Autrement dit, les entreprises sont
fortement incitées à anticiper ces périodes de vague de chaleur. "Mieux vaut
traiter le sujet en amont plutôt que le subir le jour J",
conseille David Mahé, président du cabinet Stimulus et administrateur de
Consult'in France.
Une
incitation d'autant plus forte que le plan national canicule 2017 a été reconduit en 2018 sur
une période élargie allant du 1er juin
au 15 septembre (contre fin août l'an passé). Ce plan comprend notamment le
renforcement de la sensibilisation des entreprises par la Direccte et la
médecine du travail mais également des contrôles de l'Inspection du travail
dans les secteurs les plus exposés comme le BTP.
Equipements, télétravail, horaires décalés...
"Concrètement, pour les employeurs, il
s'agit de passer en revue tous les équipements permettant de limiter ce risque
thermique, des systèmes de ventilation aux stores en passant par la pose
de films solaires sur les vitres ou encore la mise à disposition d'eau
fraîche et potable", souligne Sonia Moreau.
Au-delà des
équipements, d'autres solutions organisationnelles sont également
envisageables. "Le recours au télétravail peut être une piste intéressante, à
condition que le poste de travail du salarié soit éligible et que son logement
soit adapté, cite David Mahé. On peut aussi envisager la mise en place
d'horaires de travail décalés, en permettant aux salariés par exemple
de commencer plus tôt le matin afin de profiter de températures plus
supportables. Cette alternative est particulièrement indiquée pour les
collaborateurs travaillant en extérieur." Pour les manutentionnaires, le
port des charges les plus lourdes peut aussi, selon l'activité de l'entreprise,
être décalé sur les plages horaires plus fraîches du matin. Ces procédures font
en règle général l'objet d'une information/consultation du nouveau comité
social et économique (CSE - ex comité d'entreprise) ou des élus CHSCT, et
peuvent tout à fait être co-construites avec les représentants du personnel.
L'information et la sensibilisation des collaborateurs
aux bons gestes (hydratation régulière, port de vêtements légers, réduction de
l'effort physique, extinction d'un maximum d'équipements électriques pour
limiter la chaleur...) doit quoi qu'il arrive être a minima respectée. Le
malaise ou l'accident lié aux conditions climatiques sur le lieu du travail est
présumé relever de la responsabilité de l'employeur, qui plus est en l'absence
de mesure de prévention.
Si les entreprises sont tenues de mettre en oeuvre des
actions en la matière, difficile en revanche pour le salarié de faire valoir
son droit de retrait, uniquement valable "en cas de danger grave et immédiat
pour sa vie ou sa santé", précise Sonia Moreau. "On peut certes
l'envisager en théorie. Mais l'employeur peut effectuer une retenue sur salaire
s'il estime que le risque n'est pas avéré. Devant les juges, il reviendra alors
au salarié de prouver le bien-fondé de son absence." De potentiels
conflits facilement évitables grâce à une bonne anticipation et comunication.
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