11 avril 2019

La Société générale poursuit sa restructuration en supprimant 1 600 postes


Une large partie des suppressions de poste touchera sa division de financement et d’investissement.

     
  • Le 10/04/2019 à 07:30
  • mis à jour à 07:39
Photo d'illustration Thomas SAMSON/AFP
Photo d'illustration Thomas SAMSON/AFPLa Société générale a annoncé mardi la suppression de 1 600 postes dans le monde, dont environ 750 en France.
Pourquoi c'est important ? Engagée de longue date déjà dans une vaste restructuration, la Société Générale accentue ainsi le mouvement. Une large partie des suppressions de poste touchera sa division de financement et d’investissement, fragilisée par un environnement difficile.
Que représente la Société générale aujourd'hui ? La Société générale est l'une des principales et plus anciennes banques françaises. Le groupe emploie 148 000 personnes dans le monde, dont 20 000 dans la banque de financement et d’investissement.
Est-ce une surprise ? Pas franchement... « Ce n’est pas l’effet d’une bombe qui explose, ça fait des années qu’on s’y attendait. Malheureusement », expliquait mardi un cadre de la banque, sous couvert d’anonymat.
« Chaque année apporte son lot de suppressions de postes », s’était désolé dès lundi soir Khalid Bel Hadaoui, délégué CFDT Société Générale.
La banque a, en effet, engagé depuis 2015 un vaste plan de transformation de sa banque de détail (celle qui s'adresse aux particuliers) en France, destiné à préserver sa rentabilité tout en répondant à l’évolution numérique du secteur et des usages de sa clientèle.
Et depuis, le groupe a multiplié les annonces visant à réduire ses coûts tant en personnel, en réseau qu’en capital. Au total, sur la période 2015-2020, la banque a annoncé la suppression de près de 3 500 postes, la fermeture de 500 agences, un plan d’économies de 1,6 milliard d’euros.
En novembre 2017, le groupe avait annoncé 900 suppressions de postes.
Infographie Visactu
Infographie Visactu

Après la banque de détail, des suppressions de postes étaient attendues dans la BFI (activités de financement et d’investissement). La banque avait annoncé dès le 7 février, en présentant ses résultats annuels, vouloir réduire la voilure au sein de ces activités, notamment en baissant le capital utilisé par ce pôle bancaire à hauteur de 8 milliards d’euros, plus particulièrement sur les activités obligataires, de changes et de matières premières.
Comment vont s'organiser ces suppressions de poste ? La mise en oeuvre des suppressions de poste débutera au troisième trimestre.
« En France, ces suppressions se feraient dans le cadre du renouvellement de l’accord emploi signé avec l’ensemble des partenaires sociaux, grâce à la mobilité interne et des départs naturels et, pour certains périmètres, dans le cadre d’un plan de départs volontaires », a précisé ce mardi la banque rouge et noire.
Selon Les Echos, les employés qui choisiraient de partir pourront toucher un mois de salaire par semestre d'ancienneté. Et ce jusqu'à 15 ans d'ancienneté.
Pour ceux qui ont plus de 20 ans d'ancienneté, la rémunération variable sera aussi prise en compte, ajoutent Les Echos
Quel est le but de ce plan ? Ce plan, qui consiste à «certains ajustements stratégiques» selon la banque.
« Le groupe va concentrer son modèle de banque de grande clientèle sur les zones de force où il dispose d'avantages compétitifs durables et différenciants », afin de muscler sa rentabilité, a déclaré le groupe ce mardi.
La « Générale » compte par exemple «fermer sa filiale de trading pour compte propre», qui regroupe des activités consistant à investir sur les marchés avec les fonds de la banque ou encore recentrer ses activités de taux, crédit et changes.
L’organisation du siège des activités de banque de détail et les services financiers internationaux doit également être simplifiée, après la cession d’un certain nombre de filiales ces derniers mois, notamment au Monténégro, en Macédoine ou encore en Moldavie.
Quel est le contexte ? A l’instar de ses rivales européennes, Société Générale souffre d’un environnement de taux très bas qui compliquent la tâche de faire fructifier l’argent.
En outre, le durcissement des exigences réglementaires, dans le sillage de la crise financière de 2007-2008, et le développement rapide des nouvelles technologies ont contraint les banques à de lourds efforts pour s’adapter à ce nouveau cadre.
Pour ne rien arranger, l’année 2018 et ses turbulences boursières au dernier trimestre ont fait apparaître des difficultés dans les activités de marché chez bon nombre d’établissements bancaires européens, dans un contexte de concurrence grandissante des banques américaines qui profitent d’un marché intérieur gigantesque et rentable pour venir tailler des croupières à leurs rivaux européens plus limités par la réglementation et le paysage européens.
Signe de ces difficultés, BNP Paribas, la première banque européenne, a elle aussi annoncé un nouveau tour de vis budgétaire lors de la présentation de ses résultats 2018. Elle compte économiser 600 millions d’euros supplémentaires d’ici 2020, portant son objectif global d’économies à 3,3 milliards d’euros à cet horizon.

9 avril 2019

Les DRH toujours très accaparés par la gestion administrative


Les évolutions sociétales et réglementaires poussent les DRH à faire évoluer leurs pratiques mais ces professionnels sont encore trop accaparés par la gestion administrative. C’est l’un des enseignements de la 3ème édition du baromètre « Radioscopie des DRH » (1), que le groupe de formation Cegos a dévoilé mardi 2 avril.
04/04/2019  Fil AFP Liaisons Sociales

Les DRH toujours très accaparés par la gestion administrative
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Comment vont les DRH ? C’est tout le mérite de cette étude qui tous les trois ans depuis 2012 tente de dresser un état des lieux de la fonction. Première bonne nouvelle révélée par cette nouvelle mouture : les DRH et RRH vivent dans leur temps. S’ils ont bien du mal à imaginer l’évolution de leur fonction dans les cinq années qui viennent (35 % pensent qu’elle sera plus orientée « human partner », 34 % plus virtuelle, 32 % qu’elle devra mieux équilibrer performance économique et sociale, 13% ne savent pas), les DRH sont en effet en prise avec les transformations sociétales et l’actualité économique et sociale. Ainsi, les sondés admettent que leurs pratiques RH ont évolué sous l’effet de plusieurs leviers : l’évolution des modes de travail et des statuts (citée par 52 % d’entre eux), le stress et la souffrance au travail (50 %), les attentes des nouvelles générations (50 %), l’allongement des carrières et la présence plus longue des seniors dans l’entreprise (50 %) et les difficultés à attirer et fidéliser les talents (48 %).

Peu de valeur ajoutée liée aux réformes en cours

Egalement interrogés dans ce baromètre triennal, les salariés estiment à 66 % (78 % chez les moins de 30 ans), que leur DRH accompagne ces évolutions sociétales (égalité professionnelle femmes-hommes, politique RH inclusive, lutte contre les discriminations…).
Face à l’actualité - fusion des retraites complémentaires Agirc/Arcco, réforme de la formation professionnelle, égalité professionnelle femmes-hommes, CSE, prélèvement à la source – les choses se gâtent. Les DRH considèrent ainsi que l’impact sur leur charge de travail de ces réformes ou évolutions réglementaires est plus fort que la valeur ajoutée apportée par la ligne RH. Selon le Groupe Cegos, 41 % d’entre eux disent par exemple que le prélèvement à la source a fortement impacté la charge de travail de l’équipe RH… mais seuls 26 % estiment avoir eu une forte valeur ajoutée pour accompagner sa mise en place.

Plusieurs enjeux

Stratégiques, purement RH ou liés au climat social dans l’entreprise, les DRH doivent piloter plusieurs enjeux. Selon le baromètre, les deux enjeux stratégiques prioritaires des sondés sont actuellement les réorganisations/restructurations (50 %) et l’accompagnement des projets de digitalisation et de transformation (48 %). Sur le volet RH, les répondants ont comme principales priorités le développement des compétences et l’employabilité des collaborateurs (56 %), ainsi que l’attraction et la fidélisation des talents et des hauts potentiels (50 %). Enfin, explique Cegos,  leurs enjeux de climat social prioritaires sont « en phase avec les préoccupations de l’époque  » : agir contre les risques psycho-sociaux et le stress au travail (50 %), développer un bon dialogue avec les partenaires sociaux (48 %) et permettre de mieux équilibrer vie professionnelle/vie personnelle (47 %).

Rattrapés par les tâches administratives

Alors que l’accompagnement du développement des compétences des collaborateurs constitue, de loin, le principal critère d’attractivité (61 %) de la fonction pour les DRH et RRH aujourd’hui en poste et que ces professionnels se voient majoritairement comme des « pros » du terrain et du dialogue, ils sont, dans les faits, rattrapés par les tâches administratives. Ainsi, au quotidien, le rôle administratif demeure prédominant, représentant un quart de leur temps de travail (+13 points par rapport à 2012). Viennent ensuite :les rôles de conseil (23 %, -4 pts), de partenaire stratégique (20 %), de négociation avec les partenaires sociaux (16 %), d’expert juridique et technique (16 %). 76 % des sondés reconnaissent également passer beaucoup de temps à mettre en place des accords faisant suite à des évolutions réglementaires (+12 pts depuis 2012) et 56 % rencontrent des difficultés pour valoriser l’apport de la fonction RH aux objectifs stratégiques de l’entreprise (+4 pts). 40 % d’entre eux déclarent aussi manquer d’informations sur la stratégie de l’entreprise (+19 pts vs 2012) et 52 % se heurtent au manque de vision sociale et d’anticipation de leur direction. « La fonction RH, et c’est un héritage du passé en France, est encore très accaparée par la gestion de modes opératoires. Elle est peu dans l’innovation et la prise de risque », constate Annick Allegret, membre du directoire du Groupe Cegos.

Les horaires de travail explosent

Si les DRH considèrent à 88 % que, depuis cinq ans, leur métier s’est enrichi, qu’il devenu aussi plus stratégique (76 %), ils déplorent, dans le même temps, une dégradation de leurs conditions de travail. 64 % d’entre eux estiment ainsi que leurs horaires de travail explosent, tandis que 54 % ne parviennent pas à déconnecter des situations vécues au travail de retour chez eux. Pis : 44 % reconnaissent parfois agir contre leur éthique et leurs valeurs. « Nous retrouvons ici des ingrédients propices au développement des RPS chez les DRH », avertit Isabelle Drouet de la Thibauderie, manager d’Offre et Expertise RH au sein du groupe Cegos.

Quant aux salariés, ils réclament toujours plus de proximité à leur DRH-RRH, qu’ils perçoivent davantage au quotidien comme un gestionnaire de processus. Parmi les reproches adressés aux RH : le facteur humain insuffisamment pris en compte (34 %), le manque de transparence (26 %) et le manque de proximité (25 %). « Le niveau de confiance des salariés dans la fonction RH reste faible : 5,5 sur 10 (contre 5,6 en 2016). Et les DRH-RRH surestiment cette confiance, en l’évaluant à 6,8 sur 10 (contre 6,7 en 2016) », commente le groupe Cegos. 

Le partage de la fonction RH avec les managers ne progresse plus

Vis-à-vis des managers, le partage de la fonction RH ne progresse plus depuis 2016, constate en outre cette étude. Selon les professionnels RH interrogés, seuls 44 % des managers sont totalement impliqués dans la gestion des ressources humaines (contre 45 % en 2016 et 24 % en 2012), et 47 % des managers commencent timidement à jouer leur rôle RH (contre 44% en 2016 et 62 % en 2012). Enfin, 9 % des managers n'incarnent, selon eux, absolument pas leur fonction RH. Les salariés sont encore plus sévères puisque 32 % d’entre eux disent que leur manager est totalement impliqué dans sa mission RH, 34% qu’il assume timidement cette tâche RH, et 22 % qu’il n'assume absolument pas sa charge RH.
Pour impliquer davantage les lignes managériales dans des fonctions RH, le baromètre livre quelques recettes issues des réponses recueillies après des DRH eux-mêmes : les managers doivent être reconnus dans ce rôle (selon 48 % des DRH-RRH) ; ils doivent être « objectivés » précisément chaque année sur leur mission RH (39 %) ; ils doivent bénéficier de plus temps pour s’y consacrer (46 %), ils doivent en percevoir l’intérêt dans leur management au quotidien (42 %) ; et être formés spécifiquement sur ce sujet.
J-F. Rio
(1) Etude menée en France au mois de février 2019, auprès de 1 065 salariés et 201 directeurs ou responsables des ressources humaines, travaillant tous dans des entreprises du secteur privé ou des organisations de plus de 100 salariés.

Notre avis:

Si les  DRH travaillent  trop longtemps parce qu'elles sont trop occupées par des taches administratives sans valeur ajoutée, on ne voit pas comment elles pourraient conseiller les salariés dans leurs recherches d’évolutions  de carrières, en  proposant des emplois plus valorisant, si elles ne sont pas capables de le faire pour elles.

8 avril 2019

Agenda de la semaine du 8 au 12/4/19


La section CFTC de BPCE Sa vous souhaite une bonne semaine. 

L'accord d’intéressement de BPCE Sa est arrivé à son terme au  31/12/2018, il est nécessaire d'en négocier un nouveau.
ce type d'accord doit être conclu avant le 30/6. 
Les Organisations syndicales ont leur première séance de négociation:

  • Mercredi après midi
On vous tiendra au courant sur ce blog , étape par étape 

5 avril 2019

injures ou agissements sexistes : quand le salarié est victime, l'employeur est responsable


Lorsqu'une salariée a été victime, dans l'exercice de ses fonctions, d'agissements discriminatoires, humiliants et dégradants, l'employeur est responsable même s'il n'existe aucun lien de subordination entre lui et les fauteurs de trouble.
02/04/2019  Jurisprudence Sociale Lamy, n° 472

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Les faits
Injures ou agissements sexistes : quand le salarié est victime, l'employeur est responsableEmployée en qualité d'agent polyvalent par un club sportif, une salariée, en contrat d'aide à l'emploi d'un an, est appelée à travailler en cuisine lors d'une soirée faisant suite à un tournoi de tennis. Des bénévoles de l'association sont venus prêter main forte au personnel de l'association et se laissent aller à toutes sortes d'incivilités à l'encontre de cette salariée, non seulement des propos injurieux à connotation sexiste (« sac à foutre »), mais également des jets de détritus, salade, frites, œufs frais, sur sa personne, le tout sous l'œil indifférent de ses supérieures hiérarchiques et de son tuteur, salarié chargé de l'accompagner dans son intégration dans l'entreprise.
La jeune femme envoie une lettre à son employeur par laquelle elle se plaint des humiliations qu'elle a subies et lui reproche, par son manquement à son obligation de sécurité de résultat, de l'avoir laissée pâtir de comportements discriminatoires. L'employeur lui répond qu'une enquête interne a été diligentée mais que les faits dénoncés ne peuvent pas être interprétés comme des faits de discrimination. Il lui indique qu'elle peut demander à être reçue par le bureau si de nouveaux comportements qu'elle estimerait discriminatoires survenaient mais aussi qu'elle doit faire des efforts pour s'intégrer à l'équipe de restauration et ne pas dénigrer le club auprès des adhérents.
Compte tenu d'un état dépressif réactionnel et de son appréhension à se retrouver face aux auteurs de ces brimades, son médecin la place en arrêt de travail. Comme elle n'a que six mois d'ancienneté, elle ne perçoit que les indemnités journalières de la sécurité sociale.
Les demandes et argumentations
C'est dans ce contexte qu'elle saisit la juridiction prud'homale d'une demande en dommages et intérêts pour préjudice moral et matériel (perte de salaire).
Une première fois, elle est déboutée par la Cour d'appel de Poitiers qui retient « que la simple vulgarité indéniable des propos « sac à foutre » tenus à son égard par un autre salarié ne peut caractériser l'existence de paroles discriminatoires » et que le comportement des jeteurs de détritus étaient « inacceptables » mais pas discriminatoires.
La Cour de cassation censure les conseillers poitevins, qui, devant ces « éléments ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la salariée laissant supposer l'existence d'une discrimination », auraient dû demander à l'employeur d'établir que ces agissements n'étaient pas constitutifs d'une discrimination. Faute d'une telle démonstration, ils auraient dû donner gain de cause à la salariée (Cass. soc., 20 mai 2015, no 14-13.357).
La cause est renvoyée devant la Cour d'appel de Limoges. Devant celle-ci, les arguments changent. Il n'est plus question de remettre en question le caractère discriminatoire des faits qui font grief, l'employeur se place sur le terrain de la responsabilité. Il se réfugie derrière le fait que les personnes qui se sont mal conduites n'étaient pas ses salariés. La cour d'appel le suit dans son raisonnement et déboute la salariée de sa demande, jugeant que « la responsabilité de l'employeur ne saurait être engagée à raison de faits fautifs commis envers sa salariée par des personnes avec lesquelles il n'apparaît lié par aucun lien de préposition ».
Sans se décourager, la salariée forme à nouveau un pourvoi devant la Cour de cassation.
La décision, son analyse et sa portée
Bien lui en prend car la Cour de cassation reconnaît la responsabilité de l'employeur. L'attendu de principe est sans ambiguïté :
« Attendu que l'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de discrimination, doit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés ».
Il est rendu au visa des articles L. 1132-1 du Code du travail (interdiction de la discrimination), L. 4121-1 (obligation de sécurité de résultat) et L. 4121-2 du même code (mesures de prévention à prendre en matière de sécurité).
• Responsabilité extracontractuelle ou contractuelle ?
On aurait pu s'attendre à ce que soit également visé l'article 1242, alinéa 5, du Code civil qui rend les maîtres et commettants responsables des actes de leurs préposés (responsabilité extracontractuelle), car la question était bien là : les salariés sont-ils les seuls à pouvoir être des préposés dont l'employeur est responsable ?
“Les salariés sont-ils les seuls à pouvoir être des préposés dont l'employeur est responsable ?”
La Chambre sociale fait une sorte de raccourci, s'abstenant de mentionner l'article du Code civil sur lequel s'appuie la responsabilité patronale mais se focalisant sur les devoirs primordiaux auxquels l'employeur a manqué. Il en résulte que l'on se demande si la responsabilité à laquelle l'employeur a été condamné n'est pas contractuelle.
Dans l'affaire qui nous occupe, l'enjeu de la distinction est faible puisqu'il n'est question que d'une demande de dommages-intérêts. Il en irait autrement si la salariée avait pris acte de la rupture de son contrat ou si elle avait décidé d'interrompre son CDD en raison de ce fâcheux incident.
• Thèse de la responsabilité contractuelle
Telle qu'elle est ici présentée, la responsabilité résulte d'une faute de l'employeur, puisqu'il a manqué à son obligation de sécurité de résultat, on serait donc en présence d'une faute contractuelle.
La Cour de cassation admet fréquemment que l'employeur puisse engager sa responsabilité civile à l'égard de ses salariés pour des actes dommageables dont il n'est pas l'auteur direct. C'est tout naturellement le cas lorsque les agissements émanent d'un cadre ayant reçu délégation de pouvoir (Cass. soc., 15 mars 2000, no 97-45.916). Mais cette responsabilité s'étend aussi aux agissements commis par toute personne n'appartenant pas au personnel de l'entreprise, dès lors qu'elle exerce une autorité, de droit ou de fait, sur les salariés, par exemple, dans une EURL, la conjointe du gérant (Cass. soc., 10 mai 2001, no 99-40.059).
Dans cette dernière affaire, la Cour de cassation ne précise pas le fondement de sa solution. Il ne peut s'agir de l'article 1242, alinéa 5, du Code civil (responsabilité du commettant du fait de ses préposés qui suppose un lien de préposition entre l'employeur et l'auteur du dommage), et pas davantage de l'article 1240 du Code civil (responsabilité délictuelle et quasi délictuelle) qui supposerait que l'employeur soit l'auteur direct de la faute.
• Thèse de la responsabilité commettant/ préposé
En prenant la question sous un autre angle, on peut faire un diagnostic opposé et conclure à la responsabilité du commettant. En effet, la responsabilité fondée sur l'article 1242, alinéa 5, du Code civil suppose la réunion de trois conditions : il faut d'abord qu'il existe entre l'auteur du fait dommageable et celui dont la responsabilité est recherchée un rapport de subordination. Il faut ensuite un acte dommageable émanant du préposé et revêtant les caractères d'une faute. Il importe enfin qu'il y ait un lien de connexité entre le fait dommageable et les fonctions.
“En faisant référence aux trois articles du Code du travail cités par l'arrêt et ne visant qu'eux, la Cour de cassation a peut-être voulu se détacher complètement de cette question un peu théorique de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle”
Or, que voit-on dans notre affaire ? Que les vexations endurées par la salariée l'ont été sous les yeux de trois salariés de l'employeur, deux supérieures hiérarchiques et le tuteur de l'intéressée. Le dommage a été causé par leur passivité coupable. L'employeur n'est alors pas responsable des actes des bénévoles mais de l'absence de réaction de son personnel d'encadrement qui n'a pas protégé l'employée.
• Et si l'absence de référence au Code civil ne devait rien au hasard ?
En faisant référence aux trois articles du Code du travail cités par l'arrêt et ne visant qu'eux, la Cour de cassation a peut-être voulu se détacher complètement de cette question un peu théorique de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle et montrer aux employeurs de quelle manière ils sont censés accomplir leurs obligations de sécurité, de lutte contre la discrimination et de respect de la dignité du salarié. Ces trois devoirs sont des obligations de résultat, ils doivent rechercher ce résultat avec ferveur.
Les combats contre la discrimination et le harcèlement sexuel ou moral sont bien connus, celui pour le respect de la dignité l'est un peu moins. Ce droit fondamental, consacré par une décision du Conseil constitutionnel (Cons. const., 27 juill. 1994, no 94-343), a été renforcé par la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, publiée par décret du 4 février 2000, qui souhaite la « sensibilisation, l'information et la prévention contre les actes condamnables ou explicitement hostiles et offensifs dirigés de façon répétée contre tout salarié sur le lieu de travail ou en relation avec le travail ».


TEXTE DE L'ARRÊT


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par Y..., domiciliée 3 allée du Roussillon, [...], contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2016 par la cour d'appel de Limoges (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association Stade poitevin tennis club, dont le siège est rue de la Devinière, [...], défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2018, où étaient présents : M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP monod, Colin et stoclet, avocat de Y..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu , ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du même code ;
Attendu que l'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de discrimination, doit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 20 mai 2015, pourvoi no 14-13357), que Y..., employée en qualité d'agent polyvalent par l'association Stade poitevin tennis club, a, après avoir dénoncé par lettre du 1er avril 2010 à son employeur des faits de discrimination, saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour débouter Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier pour discrimination et violation par l'employeur de son obligation de sécurité, l'arrêt retient que les faits dénoncés ont été commis par des bénévoles de l'association qui apportaient leur aide en cuisine à l'occasion de la soirée et que rien ne permet en l'occurrence d'affirmer que ceux-ci se trouvaient sous la subordination hiérarchique de l'association, que la responsabilité de l'employeur ne saurait être engagée à raison de faits fautifs commis envers sa salariée par des personnes avec lesquelles il n'apparaît lié par aucun lien de préposition, que pour autant l'employeur n'est pas demeuré sans réaction à la suite de cet incident puisqu'il a fait procéder à une enquête interne tout en invitant son personnel à prendre toutes les précautions nécessaires dans leurs relations avec la salariée ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'absence d'autorité de droit ou de fait exercée sur la salariée par les auteurs d'agissements discriminatoires alors qu'elle avait constaté que l'insulte à connotation sexiste, proférée par un bénévole, et le jet par d'autres de détritus sur la salariée avaient eu lieu à l'occasion d'une soirée organisée par l'employeur dans les cuisines du restaurant de l'association en présence d'un salarié de l'entreprise, tuteur devant veiller à l'intégration de la salariée titulaire d'un contrat de travail s'accompagnant d'un contrat d'aide à l'emploi, sans que celui-ci réagisse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne l'association Stade poitevin tennis club aux dépens ;
Vu , condamne l'association stade poitevin tennis club à payer à la SCP Monod, Colin et Stoclet la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf.

Marie Hautefort, Membre du Comité de rédaction
[ Cass. soc., 30 janv. 2019, no 17-28.905, arrêt no 159 FS-P+B]

4 avril 2019

Parts Variables JK, clash en vue.

Nous écrivions le 12/3/19, sur l'accord parts variables


l'accord concernant les parts variables est divisé en deux parties:

  • pour les salariés avec des classifications de A à I
  • Pour les salariés avec des classifications J et K
Pour les A à I, il est mis un terme au dispositif collectif de parts variables à partir de la PV de 2018.
  • en contrepartie, sera intégré au salaire de base, par 1/12, le montant de la PV 2018, avec effet rétroactif au 1/1/19
  • le versement de la PV 2018 sera effectué en avril 2019.
Rappelons que depuis toujours, devant les difficultés de déterminer des objectifs:
  • Simples
  • Mesurables
  • Atteignables
  • Réalistes
  • définis dans le Temps
Les parts variables ont créé des problèmes sans fin, et même des procès ( intentés et gagnés par la CFTC de BPCE Sa) 

Donc la CFTC demandait une intégration des PV aux salaires.

C'est ce que nous avons obtenu, " très bien" , reste que l'intégration à vie dans les salaires sur base de référence  ( part variable 2018) peut poser des problèmes en cas:
  • Mésentente avec un nouveau chef
  • Maladie
  • .............
Des dispositifs de contrôle sont prévus ( manager, DRH) , mais nous vous conseillons avant toute démarche, d'en parle à votre délégué CFTC. 

Pour les J et K, les principe de part variable est maintenu sous forme contractuelle.
  • Pour certains le principe de parts variables contractuelles existait déjà, mais on ne savait pas pour qui et pourquoi ?
Cette mise en oeuvre répond donc à nos demandes d’éclaircissement et de justice, mais:
  • Aujourd'hui rien ne garantie que le risque de se soumettre à des objectifs ( contrairement aux A/I), soit payé d'une façon correcte
Nous vous conseillons donc de consulter votre délégué CFTC, avant de signer  l'avenant qui vous sera proposé par la DRH.

Nous pourrons accompagner aux prud'hommes, tous ceux qui considéreraient que le risque n'est pas assez payé ( Exemple: part variable contractuelle à 8 % )

Votre part variable n'est pas acquise à vie dans votre salaire, vous devez réaliser des objectifs, ça se paie.

En conclusion: 
  • Soit les managers et la DRH, prennent en compte les points évoqués ci-dessus.
  • Soit ces principes que nous avons plaisir à voir appliquer car préconisés par nous depuis très longtemps finiront devant les instances judiciaires ad-hoc ( ça serait dommage !)
Notre avis à ce jour:

Les salariés en J K ont reçu un message leurs demandant de bien vouloir accepterle principe d'une part variable variant de 0 à 8 % qui dépendrait d'objectifs annuels.
cette situation est totalement différente des salariés A/I qui eux se sont vus intégrer leur part variable  ( aussi de 0 à 8 %) dans leur salaire.
Nous pensons que cette situation est injuste et indéfendable juridiquement !
Nous remettrons donc à notre avocat et à l'inspection du travail,  les dossiers de ceux qui voudrons bien nous les confier pour une action collective .
Par ailleurs, les anciennes parts variables contractuelles  J/K varient pour beaucoup d'entr'elles entre 15 et 20 %, la Direction devra se justifier de sa politique salariale.
Et l'on ne parle encore des montants des parts variables des HC et des mandataires. (ça va venir)

2 avril 2019

Congé paternité: où se situe la France par rapport aux autres pays d’Europe?



·         Par  Mathilde Golla 
le figaro.fr

·         Mis à jour le 02/04/2019 à 14:26 

·         Publié le 02/04/2019 à 13:18

Les Espagnols viennent d’allonger la durée du congé paternité à 8 semaines contre seulement 11 jours pour les Français. Sans surprise, les pays nordiques offrent les systèmes les plus avantageux.
Depuis lundi, les Espagnols disposent de 8 semaines de congé paternité contre 5 auparavant. Ces congés sont rémunérés à 100 % «en cas de naissance, d’adoption ou d’accueil d’un enfant». En France, la durée du congé paternité est de 11 jours, le congé maternité est quant à lui de 16 semaines.
  • La France est parmi les pays les moins généreux en Europe.


Norvège: de 10 à 39 semaines
La Norvège, premier pays au monde à avoir instauré le congé paternité, propose le système le plus généreux. Les parents peuvent ensuite se répartir les semaines et choisir de percevoir 100% de leur salaire sur 49 semaines ou 80% de leur rémunération pendant 59 semaines. Dix semaines reviennent à la mère et dix semaines au père et le reste est partagé entre les deux parents.

Suède: de 60 jours à 480 jours
La Suède possède également un système avantageux. Les pères sont autorisés à prendre 480 jours de congé et autant pour les mères, payés à hauteur de 80 % du salaire. Les deux parents peuvent transférer leurs jours de congé entre eux avec deux mois minimum pour chacun d’entre eux.
Finlande: 54 jours
Comme ses voisins, ce pays scandinave est très généreux et offre 54 jours de congés payés aux jeunes pères. La mère dispose, elle, de 105 jours. En plus du congé paternité, les parents se partagent 26 semaines de congé parental (payé de 70 à 90% du salaire).

Danemark: de 2 à 34 semaines
Autre pays particulièrement protecteur, le Danemark permet aux pères de prendre 2 semaines de congé, payées intégralement. La mère dispose, elle, de 18 semaines de congé. Ensuite, les parents devront se répartir 32 semaines payés 100 % de leur salaire.

Espagne: 8 semaines
Les pères ont donc désormais droit à 8 semaines payés intégralement. En 2021, ils disposeront de 16 semaines de congé paternité, autant que les mères.

Bulgarie: 15 jours
Le père dispose de 15 jours de congés payés à partir de la naissance de l’enfant. Le congé maternité est quant à lui de 410 jours. Après le sixième mois de l’enfant, la mère peut céder une partie de son congé à son conjoint.

Slovénie: 10 jours
Les pères disposent de 15 jours de congés payés. Les parents ont également droit à un congé parental de 260 jours payé à 90% du salaire jusqu’à un certain seuil.

Italie et Grèce: 2 jours
Dans ces deux pays, le père a droit à deux jours de congé paternité, payés intégralement. Le congé maternité est quant à lui de 5 mois en Italie rémunérés au moins à 80 % du salaire, mais souvent payés à 100 % par l’employeur. En Grèce, le congé maternité est de 17 semaines, payé entre 47,47 €/jour et 66,46 €/jour.

Allemagne: pas de congé paternité mais un congé parental
L’Allemagne ne dispose pas de congé paternité en tant que tel. En revanche, à la naissance de leur enfant, les pères peuvent prendre un congé parental d’une durée maximale de quatorze mois, à partager avec la mère. Les deux parents sont alors rémunérés 67% du salaire net, plafonné à 1800 euros par mois. L’indemnité peut également être touchée par les parents qui réduisent leur temps de travail en dessous de 30 heures par mois. Elle est en outre majorée de 10% pour chaque autre enfant de moins de six ans vivant au sein du foyer.
Le congé maternité est de 14 semaines dont huit semaines après la naissance de l’enfant.

Notre avis :
  • Oui, c'est en France que les hommes s’arrêtent le moins pour les paternité, laissant aux femmes, la charge de la maternité.
    • Ce qui a bien sûr un impact inégalitaire sur le déroulement des carrières  des femmes, ainsi que sur les montant de leurs retraites.
La France, un modèle social !




1 avril 2019

Près de 60% des voitures vendues en Norvège sont électriques

REUTERS01/04/2019 à 15:26

PRÈS DE 60% DES VOITURES VENDUES EN NORVÈGE SONT ÉLECTRIQUES
PRÈS DE 60% DES VOITURES VENDUES EN NORVÈGE SONT ÉLECTRIQUES
OSLO (Reuters) - Près de 60% des voitures neuves vendues en Norvège en mars étaient entièrement électriques, un record mondial pour ce pays désireux d'interdire dès 2025 la commercialisation de véhicules équipés d'un moteur à combustion.
Afin de lutter contre les émissions de dioxyde de carbone et la pollution atmosphérique, la Norvège a supprimé la plupart des taxes sur les voitures électriques et propose d'autres incitations telles que le stationnement gratuit et la mise à disposition de bornes de recharge.
Cette décision a profité à des marques comme Tesla et Nissan et pénalisé les ventes des constructeurs tels que Toyota et Daimler, entre autres.
Selon l'organisme indépendant spécialisé OFV, les voitures électriques ont représenté 31,2% de l'ensemble des ventes automobiles en Norvège l'an dernier, contre 20,8% en 2017.
Sur le mois de mars, la part des voitures électriques a atteint 58,4% à la faveur d'une accélération des livraisons de Tesla notamment de la Model 3 vendue à 442.000 couronnes (45.855 euros), et des premières livraisons du SUV e-tron d'Audi (filiale de Volkswagen )proposé à 652.000 couronnes.
(Lefteris Karagiannopoulos et Terje Solsvik; Claude Chendjou pour le service français, édité par Catherine Mallebay-Vacqueur)

Le mode d’emploi de la DGT pour agir contre le harcèlement sexuel au travail


Comment réagir face au harcèlement sexuel au travail ? La DGT y répond dans un guide pratique et juridique diffusé le 8 mars 2019. Témoin, employeur ou victime de harcèlement sexuel ou d’agissements sexistes, les droits et obligations de chacun sont précisés.
25/03/2019  Liaisons Sociales Quotidien, 25/03/2019

Le mode d’emploi de la DGT pour agir contre le harcèlement sexuel au travail
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« La lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans le monde du travail passe par une bonne compréhension de ce que sont ces comportements illicites, ainsi que le rappel clair et précis du rôle de l’employeur et des garanties apportées aux salariés » explique le Directeur général du travail, Yves Struillou, dans un guide pratique et juridique publié le 8 mars sur le site du ministère du Travail. Répondant à un double objectif d’accompagnement et de pédagogie, ce guide vise ainsi à éclairer les différentes personnes impliquées.
Conseils donnés à l’employeur sur la politique de prévention
L’employeur est tenu de prendre en compte les risques de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes lors de l’élaboration du document unique d’évaluation des risques (C. trav., art. R. 4121-1). 
La DGT liste une série d’indicateurs lui permettant de les évaluer au mieux. Il s’agit notamment de s’interroger sur l’existence d’un précédent nécessitant une vigilance accrue, de situations de travailleurs isolés ou vulnérables, ou encore de savoir si les salariés peuvent aisément faire remonter des difficultés relationnelles dans l’entreprise. Cette évaluation doit être nourrie par des éléments de contexte et, surtout, des points de vue croisés. Il est donc préconisé d’associer médecin du travail, service de santé au travail, représentants du personnel, psychologues et ergonomes du travail, à la démarche. Il est également conseillé de constituer un groupe composé d’un panel représentatif de salariés.
Une fois le risque correctement évalué, et en complément de l’information légale, « une sensibilisation plus globale à destination de l’ensemble des salariés peut être envisagée », selon la DGT. Ces actions de sensibilisation peuvent porter, entre autres, sur la détection et l’identification des situations concrètes de faits de harcèlement sexuel, les modalités de signalement de ces situations, ou encore la protection légale des témoins et victimes. Quant au personnel encadrant, celui-ci doit être formé régulièrement à cette problématique. Pour ce faire, des objectifs portant sur cette thématique peuvent, par exemple, être intégrés dans le cadre des évaluations annuelles.
En outre, la prévention du harcèlement sexuel et des agissements sexistes peut être insérée dans le cadre de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, souligne la DGT.
Missions du référent harcèlement sexuel désigné par l’employeur
Depuis l’entrée en vigueur de la loi nº 2018-771 du 5 septembre 2018, l’employeur est notamment tenu de désigner un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes, si l’entreprise emploie plus de 250 salariés (C. trav., art. L. 1153-5-1; v. dossier juridique -Égalité- nº 182/2018 du 8 octobre 2018). Les missions peuvent être les suivantes :
– réaliser des actions de sensibilisation et de formation des salariés comme du personnel encadrant ;
– orienter les salariés vers les autorités compétentes ;
– mettre en œuvre des procédures internes afin de favoriser le signalement et le traitement des faits de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes ;
– réaliser une enquête suite à un signalement.
Signalement des faits de harcèlement sexuel par les salariés
Pourquoi signaler des faits de harcèlement sexuel ? « Car le harcèlement sexuel n’est jamais acceptable » et « ne pas en parler n’est jamais la solution », insiste la DGT. Ainsi, en l’absence de procédure préétablie dans l’entreprise, victimes et témoins sont encouragés à signaler des faits de harcèlement sexuel auprès de l’interlocuteur de leur choix : leur supérieur hiérarchique, direct ou non, un membre du service RH, le référent harcèlement sexuel, l’employeur en tant que tel, ou un membre de la délégation du personnel du CSE. Et si l’employeur lui-même est le harceleur, il est conseillé de s’orienter directement vers un élu du personnel ou l’inspection du travail.
L’auteur du signalement doit constituer un dossier dont le contenu n’est pas imposé. Mais la DGT l’invite à fournir le plus d’éléments possibles :
– le récit chronologique et détaillé des faits ;
– les éléments susceptibles de constituer des preuves (textos, mails, etc.) ;
– les certificats médicaux s’il y en a ;
– des témoignages écrits ;
– la copie de plaintes ou de mains courantes, le cas échéant.
Et, tout au long de la procédure interne, il peut se faire accompagner par le médecin du travail, l’inspection du travail, le Défenseur des droits ou les associations spécialisées.
Étapes à suivre par l’employeur en cas de signalement
Avant toute chose, la DGT invite les employeurs à « mettre en place des mesures favorisant la remontée d’information auprès des managers ou du service en charge des ressources humaines ». Par l’intermédiaire, par exemple, d’une boîte mail dédiée, ou d’une permanence au sein du service RH ou des représentants du personnel.
Ensuite, en cas de signalement, la chronologie suivante doit être respectée :
– accuser réception du signalement ;
– procéder à un échange avec l’auteur du signalement, afin de recueillir des précisions sur les faits ayant donné lieu au signalement ;
– analyser les faits signalés. Et si la piste du harcèlement sexuel ne peut pas être écartée, il est recommandé de diligenter une enquête interne après en avoir informé la victime présumée, d’autant plus si celle-ci n’est pas à l’origine du signalement. En effet, elle « peut être réticente au lancement d’une enquête par crainte des conséquences sur sa vie professionnelle et personnelle » explique la DGT.
Comment réaliser une enquête interne
En cas de suspicion de harcèlement sexuel, l’employeur est fortement encouragé à diligenter une enquête, qu’il y soit légalement contraint ou non. En ayant pour mots d’ordre discrétion et impartialité.
Lorsque la phase d’enquête est enclenchée, plusieurs personnes doivent être auditionnées : la victime, la personne mise en cause, leurs responsables hiérarchiques respectifs, la personne à l’origine du signalement, s’il ne s’agit pas de la victime, ainsi que toute personne « demandant à être auditionnée ou dont l’audition est souhaitée par la victime présumée ou la personne mise en cause ». Attention à éviter les ambiances intimidantes et à veiller à rédiger un compte-rendu détaillé et daté, alerte notamment la DGT.
Au cours de l’enquête, il est recommandé d’adapter les conditions de travail des personnes impliquées pour qu’elles n’entrent pas en contact.
À l’issue de l’enquête, si le harcèlement sexuel est reconnu, il faut que la victime retrouve des conditions normales de travail. Autrement dit, l’employeur doit « être particulièrement vigilant aux représailles dont la victime peut être l’objet de la part de collègues « solidaires » du harceleur ». Si, à l’inverse, le harcèlement sexuel n’est pas reconnu, il convient d’éviter d’instaurer un climat de suspicion et d’accompagner la poursuite des relations de travail. L’organisation de temps d’échanges individuels et collectifs est, par exemple, préconisée.
Guide pratique et juridique contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes au travail publié par le ministère du Travail le 8 mars 2019